« Dans la même région, il y avait des bergers qui vivaient dehors et passaient la nuit dans les champs pour garder leurs troupeaux. L’ange du Seigneur se présenta devant eux, et la gloire du Seigneur les enveloppa de sa lumière. » (Lc 2, 8-9)
Des bergers
On voit beaucoup de figures de bergers dans la Bible, dont le cadre historique est la vie militaire, sociale, agricole et pastorale du Proche-Orient des années -2000 à 100 de notre ère. Le thème du berger y est largement développé car il était un métier incontournable, une image de la vie quotidienne. Quelles en sont les différentes significations ?
Le berger peut symboliser celui qui guide le peuple (assimilé au troupeau), donc une figure d’autorité politique, religieuse ou militaire. C’est dans cette veine que Dieu est considéré comme le Pasteur du peuple (Psaume 79), et qu’a contrario, les « mauvais bergers » d’Israël sont vilipendés par les prophètes (Ezéchiel 34). Cette image est utilisée par Jésus pour parler de la miséricorde du Père qui ne veut pas qu’un seul ne se perde ; et en dernier recours, il s’applique cette image, lui qui est Dieu, et qui est venu dans le monde pour rassembler les brebis dispersées : « Je suis le Bon Berger. » (Jn 10, 14)
Les bergers qui nous occupent aujourd’hui semblent d’une autre trempe : loin d’être les chefs du peuple, ils semblent plutôt être de ceux qui suivent. Des pauvres, humbles, ceux qui restent dehors, qui sont mis à part. Ils sont dans la ligne du petit David, le plus jeune des fils de Jessé, qui n’est même pas présenté au prophète Samuel comme potentiel roi car il est aux champs. Ils sont des anawim, des « pauvres du Seigneur ». Ils partagent avec le Bon Berger le soin des brebis qui leur sont confiées. Habitent en eux les sentiments qui sont dans le Christ Jésus, « doux et humble de cœur » (Mt 11, 29).

Dans la nuit
L’ange vient les chercher dans la nuit. Sur leur lieu de travail quotidien, à l’heure sombre et froide.
La nuit, c’est le lieu du combat spirituel, ou l’on affronte nos obscurités, nos souffrances, nos solitudes, nos angoisses. La nuit, c’est donc le moment où l’on crie vers Dieu, comme le dit le psaume 87 :
« Seigneur, mon Dieu et mon salut, dans cette nuit où je crie en ta présence, que ma prière parvienne jusqu’à toi, ouvre l’oreille à ma plainte. »
Dieu nous écoute donc et nous exauce la nuit. C’est en effet le moment de l’intervention du Seigneur qui nous sauve, en réponse à notre prière. La nuit de l’incarnation est celle qui perce et disperse les ténèbres du monde.
« La lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas arrêté », dit saint Jean au début de son évangile. On comprend mieux la joie des bergers qui s’en reviennent, après avoir contemplé dans la crèche le Bon Berger, l’Agneau sans tache, la Lumière née de la lumière.
Et nous ?
À notre tour, cherchons à rencontrer Dieu la nuit. En priant le Seigneur juste avant notre coucher, c’est toute notre nuit que nous passons comme les bergers.
À notre tour, courons à la crèche pour voir les merveilles que Dieu fait dans nos vies, si éprouvées soient-elles. C’est précisément au cœur de ces ténèbres qu’il vient nous visiter.
À notre tour, ayons la joie de témoigner à nos proches de ce que nous vivons :
« Après avoir vu, ils racontèrent ce qui leur avait été annoncé au sujet de cet enfant. Et tous ceux qui entendirent s’étonnaient de ce que leur racontaient les bergers. Les bergers repartirent ; ils glorifiaient et louaient Dieu pour tout ce qu’ils avaient entendu et vu, selon ce qui leur avait été annoncé. » (Lc 2, 17-20)
À notre tour, gardons tous ces événements dans notre cœur pour que la graine semée par le Seigneur en cet Avent puisse germer dans la bonne terre.
« Marie, cependant, retenait tous ces événements et les méditait dans son cœur. »