Lectio divina

Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.

« Prends chez toi Marie… »

Lectio divina pour le quatrième dimanche de l’Avent

Après la petite fenêtre ouverte dimanche dernier sur la présence du Royaume de Dieu dans notre âme, nous voilà à nouveau dans l’austérité du temps de l’Avent. Les fleurs ont disparu, la joie de l’orgue s’est à nouveau effacée et nous voici face aux derniers préparatifs avant l’Avènement. Pour nous y aider, l’Eglise, poursuit la fresque commencée avec le premier dimanche de l’Avent. Elle nous avait présenté Dieu dans Son triomphe et dans Sa gloire ; puis elle nous présenta le Baptiste. Elle offre maintenant à notre contemplation le dernier personnage qui nous conduit à Jésus : Marie. La Vierge, que nous rencontrons indirectement par Joseph, est l’accomplissement parfait de la présence de Dieu dans l’âme humaine. Elle est donc notre modèle

La Liturgie nous transmet l’enseignement de la pédagogie divine

Nous nous souvenons que, le premier dimanche de l’Avent, l’Eglise nous avait parlé des noces eschatologiques promises par Dieu à chacun de nous dans la Béatitude de Sa Vie. Avec le deuxième dimanche ensuite, ce fut le Baptiste, éprouvé comme le diamant au feu de l’Amour, dans le désert. Le Précurseur vient avec sa pureté pour briser l’écorce de notre cœur afin d’y laisser entrer la Lumière. Il n’est pas la Lumière ! Il est venu pour préparer le chemin. D’où sa dureté de diamant pour faire éclater la gangue de nos habitudes, de nos tiédeurs, de nos paresses, voire même de nos duretés de pierre, quoique chrétiens ! Mais voilà qu’un autre personnage est nécessaire pour l’accomplissement du plan de Dieu.

Marie, pure transparence de l’illumination divine

Toute la justice de l’Ancien Testament, toute l’acceptation par l’homme du plan de Dieu va se concentrer non plus dans la grandeur de Jean, mais dans l’humilité d’une vierge de Nazareth, une pauvre, au sens biblique du terme : une âme qui attend le Salut d’Israël. La toute petite Marie est le point haut où se concentrent et la révélation de l’Alliance commencée près de deux mille ans auparavant, et la réponse de foi d’Israël.

Dieu n’a plus besoin, après le Baptiste, dernier des prophètes, de la dureté du diamant pour faire éclater nos cœurs de pierre, mais, du diamant, Il a besoin maintenant de la transparence. Il a besoin d’une âme qui laisse pénétrer parfaitement la Lumière qu’Il veut offrir au monde. « La Lumière est la vie de l’homme… La Lumière luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont point arrêtée… » Encore fallait-il, pour que cette Lumière apparaisse dans le monde, qu’il y ait un réceptacle, un vase parfaitement transparent, comme le diamant qui laisse passer toute la lumière ! Il fallait une âme dans laquelle aucune obscurité ne soit obstacle à la Lumière du Fils. Il fallait une personne dont l’intelligence, le cœur, le corps, tout l’être soit une humanité vide d’elle-même ! C’est le grand paradoxe de Marie que d’avoir atteint l’excellence humaine parce qu’elle était vide d’elle-même !

Marie, pure capacité de Dieu

Marie est de notre nature humaine. Marie a un cœur, une intelligence, elle est de notre chair. Il y a l’humanité présente en Marie. De même qu’il y aura l’humanité présente dans le Fils de Dieu. Mais cette humanité est absolument vide d’elle-même, elle est vierge. Totalement. Voilà un mot qu’il est difficile de prononcer de nos jours car il n’a plus beaucoup de sens ; il écorche même… Et pourtant il n’exprime rien d’autre pour un être que son référencement à Dieu seul !

La virginité est le signe, l’expression de la plus grande espérance en les épousailles de l’eschatologie. Celui qui est vierge, celui qui se consacre totalement dans son cœur, dans son âme, même dans son corps à la virginité c’est celui qui n’espère rien d’autre que l’accomplissement des épousailles entre Dieu et son âme. Il n’espère que cela, il attend, et ‘se met en réserve’, quelle que soit la légitimité des joies du mariage… Il réserve son cœur, son corps et son âme pour les noces éternelles et parfaites. La virginité est l’expression d’une âme totalement tournée vers Dieu, vers Sa Vie, vers Sa venue, vers Sa présence dans l’âme…

C’est pourquoi Dieu, à la recherche du vase pouvant contenir parfaitement la Vie qui est la Sienne et qu’Il désire donner aux hommes, va choisir Marie, la vierge de Nazareth, celle qui est pure capacité de Dieu, celle qui est à l’écoute de Sa Parole.

Marie, première Eglise, en est la figure parfaite

Marie, vierge, devient également épouse et mère, recevant en plénitude la Vie de Dieu. Ce faisant, elle accomplit la figure du Temple, ce lieu solennel sur lequel se concentrent tous les regards et toute l’histoire de l’Ancien Testament, point fort de la Royauté, construction grandiose faite pour protéger la présence de Dieu, la présence de Sa Parole gravée dans la pierre des Tables de la Loi. Rien n’est plus important pour le peuple d’Israël que le Temple. Marie accomplit cette figure car elle porte en elle le saint des Saints : le Christ, chair de sa chair uni substantiellement au Verbe, Parole du Père !

Marie accomplit la figure du Temple. Et elle est également la figure du temple de la Nouvelle Alliance : l’Eglise ! Nous nous souvenons de ce que dit saint Paul : « Le Christ a donné sa vie pour Son épouse, l’Eglise, pour la rendre pure et vierge. » Marie est la première Eglise, elle en est la figure parfaite. Marie est la première expression de cette autre vierge et de cette autre épouse qu’est l’Eglise de Jésus-Christ.

Vierge et Epouse, Marie voit s’accomplir ici-bas comme une anticipation des noces eschatologiques, les noces de son âme avec Dieu. Et le fruit de ces noces anticipées est Jésus, natus ex Maria Virgine…

Marie attendait, comme nous, les noces parfaites et éternelles avec Dieu dans Son Royaume, mais elle eut la joie, par sa virginité absolue, d’être dès ici-bas, parfaitement épouse et mère. Epouse de Dieu et Mère de Dieu.

De vierge, Marie devient épouse et d’épouse, Marie devient Mère. Là encore, elle est figure de l’Eglise, puisque Jésus a créé Son Eglise pour donner Dieu aux hommes et les hommes à Dieu, comme Marie nous donne Jésus et nous donne à son Fils.

« Ma mère est celui qui écoute la parole et la met en pratique… »

Voilà ce que nous pouvons contempler dans ce quatrième dimanche pour nous préparer à la Naissance de la Sainte Nuit, pour nous préparer au mystère de l’Incarnation revécu liturgiquement dans chaque église du monde.

Deux personnes ont eu à recevoir de manière directe, et sur l’ordre de Dieu, le mystère de Marie. Au commencement de l’Incarnation, il y a Joseph comme nous l’entendons dans l’Evangile de ce 4ème dimanche ; à la fin de ce même mystère, il y aura Jean l’Evangéliste : « Fils, voici ta mère… » Tous les deux sont chastes, tous les deux sont purs, tous les deux sont humbles et pauvres. Et c’est pourquoi ils vont pouvoir recevoir tous les deux ce mystère de Marie qui est aussi important que le mystère de son Fils.

Joseph comme Jean vont recevoir Marie chez eux. Joseph, qui deviendra le Patron de l’Eglise universelle, et Jean, figure du Sacerdoce, les deux reçoivent Marie, vivent dans son entourage et vont puiser dans la contemplation de Marie tous les mystères du Christ et de l’Eglise, le mystère de la virginité, de ces épousailles et de cette maternité de Dieu qui est notre propre mystère : « Ma mère est celui qui écoute la parole et la met en pratique… »

Dieu-avec-nous, Dieu pour nous…

Marie est l’image de l’Eglise, Marie est l’image de nos âmes. Nous aussi, nous sommes appelés, dans la virginité spirituelle de notre cœur, à être l’épouse de Dieu qui renouvelle la grâce de Sa présence à Noël. Nous sommes invités, non pas encore au festin eschatologique, mais à recevoir dans la grâce de l’Eucharistie de Noël, la présence de Jésus. Après ces épousailles, nous sommes appelés à la maternité, c’est à dire à donner le divin Fruit au monde et non à le garder celé dans notre cœur…

Epouse, Vierge et Mère, c’est la grâce que nous devons demander à Marie, dans cette messe préparatoire au mystère de l’Incarnation, afin d’être conscients de ce qui nous est demandé, de ce qui va nous être donné (en proportion de notre virginité intérieure), et de ce qui nous sera demandé de donner à notre tour, autour de nous, en proportion de ce que nous aurons reçu.

Mgr Jean-Marie Le Gall

Aumônier catholique

Hôpital d’Instruction des Armées de Percy, Clamart.

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