Prier à l’école de saint Martin

Le 14 novembre 2025

Que peut bien nous dire un soldat, moine, évêque de la fin de l’empire romain sur l’art délicat de la prière ? Le monde de Martin n’est plus le nôtre ; les attentes et besoins spirituels ont radicalement changé. Et pourtant, par-delà les siècles qui nous séparent de lui, saint Martin demeure un maître spirituel sûr pour nous guider sur le chemin de la prière.

Aller au désert

« Martin priait sans cesse, même quand il avait l’air de faire autre chose » écrit Sulpice Sévère, le principal biographe de Martin. Cet idéal de la prière continue, l’apôtre des Gaules l’a puisé chez ceux que l’on nomme « les Pères du désert », ces hommes qui, dans les premiers siècles de la vie de l’Eglise, se sont enfoncé dans la solitude du désert pour y chercher Dieu et y combattre l’Adversaire. On a quelque peine aujourd’hui à comprendre l’extraordinaire attrait exercé par le désert sur ces premières générations de chrétiens. La période des persécutions ayant pris fin, le désert prit chez eux la place du martyre comme accomplissement de la vie chrétienne. Le désert devint ainsi le symbole d’une vie totalement offerte en vue de se laisser « saisir par le Christ » (Ph 3,12). Lorsque saint Martin s’installe seul à Ligugé, près de Poitiers, ou lorsque devenu évêque il se rend aux portes de Tours pour de longs séjours à Marmoutier, il entend vivre de cette « spiritualité du désert ». L’apôtre des Gaules, l’évangélisateur des campagnes, le missionnaire zélé, est d’abord et avant tout un chercheur de Dieu, attentif à s’extraire des urgences du quotidien pour trouver l’unique nécessaire : la rencontre vivifiante avec le Seigneur Jésus.

La cohérence d’une vie

Martin a vécu l’idéal de la prière continue à travers une existence en apparence très fragmentée : né en Pannonie – l’actuelle Hongrie -, il a grandi en Italie puis vécu en Gaule. Tour à tour militaire, moine et évêque, il s’est retrouvé mêlé, souvent malgré lui, à bien des vicissitudes militaires, politiques ou ecclésiales. Mais à travers tous ces soubresauts, ce qui a donné à sa vie son unité et sa cohérence, c’est bien la prière. Martin passe insensiblement de la prière à l’action, de la mystique à la mission. Il prie en même temps qu’il évangélise. C’est dans le même mouvement de l’être qu’il est présent à Dieu dans la prière et présent aux hommes par le service apostolique. Il n’y a pas chez lui de fracture entre le dehors et le dedans. En témoigne le geste de la « charité de Tours » : alors qu’il s’apprêtait à célébrer la messe, Martin est interpellé par un homme à demi-nu qui le supplie de lui donner un vêtement. L’évêque appelle alors l’archidiacre et lui ordonne de faire vêtir le malheureux. L’archidiacre tardant à accomplir sa tâche, le pauvre fait irruption dans la sacristie, se plaignant d’être oublié. Aussitôt, Martin, sans être vu, écarte son surplis et par-dessous tire sa tunique dont il couvre le pauvre en le congédiant. Au cours de la messe, un globe de feu jaillit : ce symbole de la charité atteste que Martin vit pleinement du mystère d’amour qu’il célèbre à l’autel.

L’appel à l’intériorité

Au fond, l’exemple de Martin est un puissant stimulant pour retrouver le sens de l’intériorité. La prière a été chez lui une respiration de l’âme et du cœur. Il a compris que seule la prière peut donner à tous les instants de la vie ce souffle, cette épaisseur sans lesquels les plus beaux actes, aussi nobles et généreux soient-ils, manquent de consistance. Cette prière libère d’une recherche de l’efficacité toute extérieure. Dans la mesure où l’action s’est faite envahissante dans sa vie trépidante, la prière l’a été également. Il voulait porter haut les bras de la croix et il a solidement fiché la hampe en terre, dans la profondeur de sa vie intérieure.

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