Lectio divina

Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.

« JE PARS, MAIS JE REVIENDRAI ET VOUS VOUS REJOUIREZ. »

Lectio divina pour la solennité de l’Ascension
Ac.1, 1-11 Ep.1, 17-23 Mt.28, 16-20

La célébration liturgique de l’Ascension, passe quelquefois un peu inaperçue entre le dimanche de Pâques -la Fête des fêtes -, et celui de la Pentecôte. C’est un jeudi discret qui nous rappelle à l’église… Et pourtant c’est sûrement le mystère, très mystique, très intime, qui synthétise le mieux à la fois le mystère de Jésus dans le dimanche de Pâques et le mystère de l’Église qui sera présenté et commémoré le jour de la Pentecôte. Ce jeudi de l’Ascension, comme un trait d’union, rassemble, réunit et nous indique de quelle manière, (c’est surtout ça qui est important), le mystère de la Pentecôte et donc de l’Église est indissociable du mystère du Christ.

Essayons de voir quelques thèmes porteurs de ce mystère de l’Ascension. J’en retiendrai cinq. Cinq thèmes qui sont cause de joie comme nous l’avons prié dans la Collecte. Cinq thèmes qui fleurissent, en tous cas qui devraient fleurir, dans notre cœur comme les cinq plaies du Christ fleurissent dans notre rédemption.

« L’Église est l’accomplissement total du Christ. »

Le premier thème, énoncé par Saint-Paul dans la lecture, est celui de l’espérance du ciel. C’est elle qui est cause de notre première joie !

Paul nous assure cette vérité extraordinaire, comme pour nous préparer justement à y réfléchir avant la Pentecôte, que l’Église est le Corps du Christ. Cela nous paraît évident depuis que le Concile Vatican II a bien mis en relief cette image théologique de l’Église. Mais nous devrions nous efforcer d’y réfléchir et de voir quel est le sens profond de cette expression de « Corps mystique du Christ. »

Paul nous dit que l’Église est le corps et Jésus est la tête.

Mais il y a cette autre expression aussi extraordinaire lorsqu’il nous dit : « L’Église est l’accomplissement total du Christ » en ce sens que Jésus-Christ Tête et l’Église Corps du Christ ne font véritablement qu’une seule personne, qu’une seule personnalité spirituelle et mystique, le Christ total. Donc là où la Tête est passée, le Corps est appelé à y aller !

Cette déclaration paulinienne, qui est le fondement de la théologie de l’Église, est pour nous la promesse que le Ciel est l’endroit fait pour récupérer et rassembler nos humanités personnelles à la suite de l’humanité personnelle de Jésus.

« Je ne vous laisserai pas seuls. »

La deuxième joie, qui découle de la première, est la joie de cheminer dans la vie, avec la Vie et vers la Vie.

Jésus nous le dit, par l’intermédiaire de Ses disciples : « Je ne vous laisserai pas orphelins. Je ne vous laisserai pas seuls. »

Et puisque Jésus s’en va avec Son corps qui cesse d’être visiblement présent, c’est donc une présence de Son âme, c’est une présence de Son esprit qui va nous accompagner : c’est la présence de l’Esprit-Saint !

Cet Esprit est Vie : « Mes paroles sont esprit et elles sont vie. » Et c’est cet Esprit vivificantem, cet Esprit vivifiant, cet Esprit qui a été le moteur de vie, la dynamique de l’amour de Jésus, cet Esprit qui « achève dans le monde toute sanctification » commencée avec le mystère de l’Incarnation, c’est Lui qui nous accompagne.

Le Christ nous en fait la promesse : « Le Père vous enverra l’Esprit, un autre défenseur. » Voilà que Jésus s’en va et qu’Il nous promet Son Esprit pour nous accompagner dans notre chemin vers le Ciel, vers ce lieu habilité à recevoir nos humanités personnelles.

« Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie. »

La troisième joie du mystère de l’Ascension est la mission : « Vous serez mes témoins. »

Est-ce que nous nous rendons compte de l’importance de cette expression de Jésus qui nous confie la mission, la même mission, une mission absolument identique à celle que le Père Lui a confiée : « Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie » ?

Comme Jésus est le révélateur du Père, (Jésus est le Verbe), le baptisé est le révélateur du Christ : « Vous serez mes témoins à Jérusalem, en Samarie et jusqu’aux extrémités de la terre. »

La même mission implique la même intimité. La même confiance, implique la même proximité : « Qu’ils soient eux aussi en moi comme moi je suis en toi Père afin que les hommes croient que tu m’as envoyé », afin que les hommes croient en la Bonne Nouvelle du Salut…

Afin que les hommes croient que « tu m’as aimé et que je les ai aimés comme tu m’as aimé… » …

Afin que les hommes croient que « je suis venu non pas pour juger mais pour sauver le monde… »

Afin que les hommes croient que « le Père a tant aimé le monde qu’il a envoyé son Fils pour sauver le monde et pour que le monde ait la vie. »

Voilà que Jésus nous associe à Sa mission ! Tout chrétien, tout baptisé, en tant qu’il est configuré à Jésus, est configuré à Jésus prêtre, prophète, roi ; en tant qu’il est configuré à Jésus, Bonne Nouvelle du Salut, il est configuré à Jésus qui est Évangile du Père, et il est configuré à Jésus Sauveur du monde !

« Celui qui me mange vivra par moi. »

La quatrième joie du mystère de l’Ascension, c’est que cette mission qui nous est confiée par Jésus et qui demande la même intimité que celle de Jésus avec Son Père, cette mission va nous pousser à réaliser la promesse que Jésus a faite à Ses apôtres dans l’intimité du mystère eucharistique.

« De même que le Père m’a envoyé et que je vis par le Père, de même celui qui me mange vivra par moi. »

Le Fils n’a pu révéler le Père que par Son intimité avec le Père. Celui qui est tout tourné vers le Père, Lui seul connaît le Père et nous L’a fait connaître. Et de même c’est en fonction de l’intimité que nous aurons avec Jésus, que nous pourrons faire connaître Jésus.

Et comme Jésus veut que nous Le fassions connaître jusqu’aux extrémités de la terre, Il exige de nous et Il nous promet une intimité qui est non seulement l’intimité de Son Esprit, (la communion avec l’Esprit-Saint rappelée plus haut, cette présence accompagnatrice de l’Esprit qui est vie et sainteté), mais aussi une compagnie de Son corps.

Il ne s’agit pas seulement d’avoir l’Esprit de Jésus pour être uni à Jésus, il faut aussi se laisser agir par cet Esprit comme l’Esprit a fait agir Jésus. Il faut se laisser pousser par l’Esprit comme Jésus s’est laissé pousser par l’Esprit après le Jourdain, pour aller au désert, puis initier Son ministère public, et finalement la Passion et l’Acte Unique qui résume ces trois ans de ministère, d’enseignement et de miséricorde : l’offrande intérieure et physique sur la croix par Amour du Père et par Amour des hommes.

Je suis chrétien si je possède l’Esprit de Jésus c’est-à-dire si je me laisse agir par l’Esprit de Jésus, si je me laisse conduire, si je me laisse « pâtir » comme Jésus s’est laissé pâtir (cf. Sa Passion) et a subi l’amour du Père sur le monde jusqu’à en donner Sa vie.

Cette participation à la Passion du Christ, cette compassion m’est promise en même temps qu’elle m’est exigée par Jésus à travers le mystère de l’Eucharistie : « Qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui. »

« Viens Seigneur Jésus ! »

La cinquième joie du mystère de l’Ascension (qui en fait est la première) c’est la joie de l’Apocalypse, c’est la joie du « Viens Seigneur Jésus ! »

Car si le Christ est reparti, (aujourd’hui nous célébrons Sa montée au ciel, Son Ascension à la Droite du Père), c’est pour qu’Il revienne comme Il le promet à Ses apôtres : « Je pars mais je reviendrai et vous vous réjouirez. »

Et ce retour de Jésus, c’est le retour en gloire, c’est le retour définitif dans l’humanité sanctifiée.

Alors nous qui appartenons à ce temps de l’Église, nous qui appartenons au temps de la Pentecôte, nous savons que Jésus va revenir. Nous nous trouvons dans la même situation que ces justes de l’Ancien Testament, rassemblés en Marie, qui attendaient la venue de Dieu. Pour nous ce ne sera pas la venue dans l’humilité de la chair, mais ce sera le retour dans la gloire du Ressuscité. Nous sommes dans ce temps de l’attente, de l’attente définitive, l’attente du Seigneur.

Voilà les cinq plaies de Jésus qui fleurissent aujourd’hui l’Ascension pour nous préparer à entrer et à vivre dans le mystère de l’Église, poursuite, communication et diffusion du Mystère pascal ; pour nous aider à vivre l’espérance du Ciel ; pour nous introduire dans le mystère de l’espérance messianique.

Pour faire de nous enfin des témoins par l’accompagnement de l’Esprit, c’est-à-dire pour être les images, les ostensoirs, les présences du Christ dans le monde… Et ceci en fonction de notre communion à l’être et à l’agir de Jésus, en fonction de notre communion à Son mystère de Croix et de Gloire : « Père glorifie ton Fils comme le Fils te glorifie » !Et donc en fonction de notre communion à l’Eucharistie.

Voici cinq motifs de joie que nous demandons de contempler aujourd’hui.

Mgr Jean-Marie Le Gall

Aumônier catholique

Hôpital d’Instruction des Armées de Percy, Clamart.

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