Lectio divina

Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.

« VIENS SEIGNEUR JÉSUS ! »

Lectio divina pour le 4ème Dimanche de l’Avent – Année B

2 S. 7, 1-16 Rm. 16, 25-27 Lc. l, 26-38

Après les fastes du troisième dimanche d’Avent, nous retrouvons une certaine pénitence avant de nous préparer aux festivités de la Nativité. Le quatrième dimanche est traditionnellement celui que l’Eglise consacre à Notre Dame. C’est le dimanche de Marie, mais ce n’est pas un dimanche de dévotion au mauvais sens du mot, comme il y aurait le dimanche de Saint Antoine de Padoue ou le dimanche de Saint Denis ou de Saint François d’Assise. C’est le dimanche du mystère de Marie, Myriam, c’est-à-dire « la voyante », celle qui voit. Pourquoi voit-elle ? Et que voit-elle ?

« Judas fut pour Dieu un sanctuaire… »

La première lecture nous renvoie directement à ce passage de l’Evangile de Jean où Jésus interpelle la Samaritaine en répondant à son affirmation que les Samaritains adorent sur le Mont Garizim et que les Juifs adorent à Jérusalem : « Ce n’est plus ici ou là que nous adorerons Yahwé parce que mon Père cherche des adorateurs en esprit et en vérité. »

En effet, et c’est le thème de la première lecture, le temple de Dieu ne peut être un temple de pierre qui est fait par les hommes, et qui, par là même, ne peut pas contenir Dieu. Le véritable temple de Dieu, celui que Dieu se choisit librement, c’est l’homme parce qu’il est fait par Dieu et que donc, il est capable de recevoir Dieu et de Le voir.

Et pour quelle raison Dieu se choisit-Il ce temple dans l’humanité ? Pour, à Son tour, nous dit le prophète, donner à l’homme une maison !

Nous pensons que c’est toujours nous qui agissons vers Dieu et pour Dieu : nous faisons plaisir à Dieu, nous donnons de la gloire à Dieu, nous sommes gentils, nous venons à la messe, le Bon Dieu va être content. Mais c’est inverser les choses ! C’est Dieu qui agit, c’est Dieu qui lance le monde, c’est Dieu qui crée l’homme, c’est Dieu qui veut le bonheur de l’homme… En un mot, comme dit Jean : « C’est Dieu qui nous a aimés le premier… » Et c’est pour cela qu’Il veut nous faire une maison ! « Je ferai pour toi une maison. »

« Attends, c’est moi qui te ferai une maison. »

Lorsque donc David se pose le problème, tout à fait légitime et sympathique, de faire une demeure pour l’Arche d’Alliance, donc pour Yahwé, Dieu lui répond : « Attends, c’est moi qui te ferai une maison. » Autrement dit cette action de Dieu que de venir en l’humanité comme en Son Temple est orientée vers une fin bien précise : donner une maison à l’homme, et cette maison que Dieu veut et va donner à l’homme, c’est le Ciel !

Autrement dit, c’est par amour que Dieu va venir en notre humanité : Dieu va établir Sa demeure sur notre terre pour que nous puissions avoir à notre tour notre demeure chez Lui ! L’Evangile nous décrit tout simplement la réalisation de cette prophétie, de ce projet de Dieu.

Le Temple que Dieu se choisit dans l’humanité, c’est Marie, celle que Bernanos, dans un raccourci magnifique, décrira comme « la cadette du genre humain », parce qu’elle n’a pas connu le péché d’Eve son aînée. Oui, Marie est la plus petite qui, pour cela, porte toute l’humanité, toute l’espérance des hommes vers la Rédemption.

Myriam, la voyante qui voit Celui qui est…

Marie, « la voyante »… La voyante parce qu’elle est le temple et qu’elle va pouvoir contempler en elle, au nom des hommes et au nom de l’Eglise, la présence d’un Dieu qui vient pour sauver. Car c’est pour cela que Dieu vient, respectant ainsi la définition qu’IL donna de Lui-même : « Je suis Celui qui Suis », signifie Celui qui est, agissant, perpétuellement dynamique et Rédempteur.

Jésus : « Dieu sauve » voilà ce que cela veut dire en hébreu. Dieu sauve, c’est-à-dire Dieu est à jamais, depuis toujours et pour toujours. Il est dans la plénitude de Sa nature divine qui est d’aimer donc d’agir et de sauver.

On comprend alors bien sûr le comment de cette Incarnation, décrit par l’évangile : l’Amour, l’Esprit-Saint c’est-à-dire le Dieu-Amour, l’Amour-Dieu : « L’Esprit Saint te couvrira de son ombre. »

Voilà la réalisation de cette prophétie. Marie est le Temple, l’oratoire en lequel Dieu va se complaire pour Se préparer à Sa mission salvatrice, mission d’Amour, comme le suggère l’intervention de l’Esprit-Saint, Amour consubstantiel entre le Père et le Fils.

« Soyez saints comme votre Père est saint. »

En étant en nous par Sa présence amoureuse, Dieu fait alliance : « Celui qui naîtra de toi sera appelé Saint. » Or, Dieu seul est Saint, nous le savons.

« Soyez saint  parce que Je suis saint. » Dieu seul est Saint. Si donc Jésus, vrai Dieu et vrai homme est appelé Saint, cela veut dire que tous les hommes ensuite, depuis cette Incarnation, pourront eux aussi être appelés saints. Voilà l’ordre de Dieu, l’ordre au sens de l’organisation du monde, pas au sens de l’ordre militaire : l’homme est ordonné à être saint !

Voilà l’Alliance. Ce n’est pas du marchandage comme nous le pensons souvent : je donne ceci (une B.A.) pour avoir cela (le Ciel). Non, je suis dans l’ordre de Dieu qui est de me sanctifier, c’est-à-dire de me faire participer à Sa vie, « d’être-en-alliance », « d’être marié à Lui. »

Car rien n’est impossible à Dieu. Ni la stérilité, ni le péché, ni le mal ne sont plus forts que Lui. La stérilité d’Elisabeth comme la stérilité des femmes dans la Bible est le signe (comme les autres maladies, mais d’une manière plus spécialement marquante) de la Mort, c’est-à-dire de la non-transmission de la vie. Une femme stérile : quelle peine, quelle souffrance pour son cœur ! Quelle douleur de ne pas pouvoir enfanter, de ne pas pouvoir transmettre cette vie pour laquelle l’homme est fait !

La stérilité est donc dans le langage biblique le symbole de cette impuissance de l’homme non pas seulement à transmettre la vie de l’espèce, mais à marcher vers la Vie. Or, comme « Rien n’est impossible à Dieu », Dieu peut faire alliance et nous redonner le pouvoir de nous avancer sur le chemin de la Vie.

« Je me tiens à la porte de ton cœur et je frappe. Si tu ouvres… »

Quelle est la leçon que nous devons tirer pour nous, pour ce Noël qui arrive demain ?

La première leçon est que c’est toujours Dieu qui agit en premier. Redisons ce mot de Jean : « C’est Dieu qui nous a aimés le premier… »

La deuxième leçon est que Dieu a besoin de notre volonté bonne. Car Dieu ne demande pas de la bonne volonté (qui la plupart du temps s’étiole sans rien produire), Il demande de la volonté bonne (c’est à dire du courage pour faire le bien). Comme David qui voulait construire un temple à son Seigneur, comme Marie qui voulut se consacrer à Dieu par sa virginité.

Si nous avons de la volonté bonne, Dieu vient et dépasse toutes nos espérances, comme disait Sainte Thérèse.

Dieu ne viole pas l’âme. Il ne s’impose pas à notre cœur. Mais si nous L’attendons, si nous désirons Sa venue, si nous désirons Sa présence, Il nous comble de manière extraordinaire parce que le don qu’Il nous fait, c’est Lui-même, c’est Son Amour qui exprime la substance de Sa vie trinitaire.

« Que le Seigneur te donne selon ton cœur… »

Réfléchissons donc sur ce mystère de Noël que nous allons célébrer. C’est un mystère qui se joue avec deux acteurs : Dieu et l’homme.

Il y a l’acte de Dieu en fonction de l’attente de l’homme. Comme dit le psalmiste : « Le Seigneur te donnera selon ton cœur… »

C’est vrai que Jésus est venu chez les siens et que les siens ne l’ont pas reçu. Mais c’est vrai aussi que dans Sa venue dans la grâce, Jésus ne vient pas comme cela, à perte : Jésus ne vient que pour ceux qui L’attendent, pour ceux qui Le désirent et Lui ouvrent la porte de leur cœur !

Laissons Dieu faire Son travail.

« Viens Seigneur Jésus !… »

Nous avons suffisamment de foi pour savoir que Dieu viendra si nous Le désirons, si nous attendons Sa présence en nous !

Pas cette présence sucrée qui devient la caricature païenne de notre Liturgie chrétienne : le sapin de Noël, les bonbons, les gâteries, le foie gras…

Tout cela doit être relativisé car n’a de sens que par rapport au motif de la joie : la venue du Sauveur, dans la grâce, en nos cœurs…

C’est donc l’attente d’une présence forte : « Je suis venu instaurer un Royaume qui souffre violence. » dira Jésus.

Oui, nous attendons la présence d’un Dieu Rédempteur, c’est à dire sanctifiant notre vie, sanctifiant l’année qui commence tout de suite après Noël.

Nous nous engageons à Le suivre sur la route intérieure qu’Il ouvrira dans notre cœur ! Nous ne voulons pas Dieu pour les cadeaux, pour le repos des congés de Noël… Nous voulons Dieu pour changer nos vies, pour faire alliance avec Lui, pour construire notre sainteté…

C’est dire que nous voulons Lui donner notre cœur comme demeure afin qu’Il nous donne Son Cœur pour notre maison. A jamais !

Mgr Jean-Marie Le Gall
Aumônier catholique
Hôpital d’Instruction des Armées de Percy, Clamart
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