Jr.1, 4-10 Phil.1, 20-24 Mt.25, 31-40
CHARITAS CHRISTI URGET NOS !
Nous sommes heureux de partager avec vous la fête de notre Patron céleste, Saint Martin, apôtre des Gaules. C’est l’occasion pour nous tous, séminaristes et prêtres de la Communauté Saint-Martin, de partager avec vous un temps important de notre vie puisque cette solennité nous invite toujours à revisiter et se réapproprier l’esprit martinien.
Fils et frères sont une seule et même chose !
Oui, il s’agit de se recaler sur la spécificité de notre Communauté, sans hésiter, dans le même temps, à développer ce charisme de richesses découvertes et offertes au pot commun de notre vie familiale.
Je commence par préciser combien fils et frères est une seule et même chose et que la vie fraternelle est la réalisation, l’épanouissement de la relation filiale avec Dieu. C’est pourquoi nous sommes fils et frère, fils et donc frères, frères parce que fils…
Le treizième apôtre glorifia le Christ tant par sa vie que par sa mort
Dans la Collecte de la messe, l’Église reconnaît que St Martin, dénommé depuis toujours le Treizième apôtre, glorifia le Christ tant par sa vie que par sa mort.
Commençons par sa mort qui eut lieu à Candes, une paroisse de Touraine où l’évêque venait rétablir la paix dans une communauté de prêtres.
Martin mourant s’approprie les paroles de la lettre aux Philippiens que nous venons d’entendre : « Je ne sais plus comment choisir, je me sens pris entre les deux, je voudrais bien partir pour être avec le Christ ; mais à cause de vous je dois demeurer en ce monde… »
Dans ce texte, qui sera repris comme antienne des Vêpres, Martin manifeste deux attentes : rejoindre le Christ ou L’apporter aux nations ! Si Martin hésite entre ces deux voies, c’est qu’elles permettent toutes deux de combler le même profond désir qui traverse sa vie : « essere cum Illo », être avec Lui !
Ce désir sera satisfait par la mort bien sûr, mais également par la vie missionnaire. Car annoncer le Christ, c’est Le laisser en moi vivre ma vie devant les hommes. C’est être son saint sacrement, son dévoilement. C’est être le Christ devant mes frères.
Être le Christ devant nos frères
Justement la lecture d’Isaïe et l’évangile nous renvoient à la vie de Martin. Vêtir, visiter, nourrir l’homme… Pas seulement de pain terrestre, mais aussi de tout ce qui sort de la bouche de Dieu : la vérité du Christ et les sacrements du Salut !
Pour exprimer la perfection de ce premier saint non-martyr, la tradition liturgique offre la péricope évangélique dans laquelle Jésus donne l’ultime critère d’appartenance au Royaume : l’amour envers les pauvres en tant qu’à travers eux je manifeste concrètement mon amour du Christ !
Oui, Jésus nous appelle, avec Martin, à être « christ comme chrétien » poussé par amour vers le « christ comme pauvre. » Le Christ en moi va servir par amour les besoins du pauvre en Christ.
C’est ce désir permanent d’être un avec le Christ, d’être trouvé en Lui, d’être dissous en Lui, selon les expressions fortes de Saint Paul, qui nous ferons être missionnaires tant que nous vivrons et jusqu’à notre pâque. Comme Martin nous serons poussés à donner notre vie pour les autres par amour du Christ: Charitas Christi urget nos !
Charitas Christi urget nos !
La mission est inhérente à notre consécration baptismale car la mission n’est rien d’autre qu’une consécration en acte et en vérité. C’est encore plus fort pour la mission apostolique par rapport à la consécration sacerdotale.
Ainsi le Christ est tellement intime à nous-même dans notre être comme dans notre agir que « ni la vie ni la mort ne peuvent nous séparer de Lui » dit encore la Collecte.
Ni la vie car aucun de nos actes ne seront posés en dehors de Lui qui se trouve à l’origine de toutes nos motions, pensées, paroles et actions…
Ni la mort car cette présence du Christ est si profonde qu’elle ne dépend pas de nos qualités qui augmentent ou diminuent au cours de la vie. Cette présence n’est pas dans les facultés de l’âme comme un instrument dont nous userions pour démultiplier nos capacités intellectuelles et affectives.
Cette Présence est intrinsèque à l’âme. L’âme est comme un lieu supplémentaire mis à la disposition de l’incarnation du Christ. Aucune diminution physique ou psychique, pas même la mort ne peuvent supprimer ni atteindre cette Présence.
La solidarité pastorale, propre de l’agir missionnaire des frères de Martin
Puisque nous sommes fils et frères dans notre être sacerdotal martinien, nous devrons tout naturellement être fils etfrères dans l’agir sacerdotal qu’est la mission.
Puisque c’est ensemble que nous sommes avec Lui, c’est aussi ensemble que nous sommes envoyés pour L’annoncer aux hommes. A la suite de Saint Martin, nous suivons la voie tracée par Jésus pour ses apôtres. Nous bâtissons notre vie missionnaire sur cette solidarité pastorale qui s’enracine dans notre vie commune de frères, elle-même dépendante de notre commune filiation au Père des Cieux.
La solidarité pastorale est la couleur fondamentale de notre activité missionnaire puisqu’elle est l’expression dans l’agir de ce que nous sommes par notre choix sacerdotal martinien. La solidarité pastorale, c’est le déploiement dans le ministère de ce qui fait le cœur de notre modus vivendi : la vie fraternelle et le partage. C’est la raison pour laquelle une des particularités pastorales les plus fortes de la CSM, the Martinian’ touch, qui forge la spécificité du ministère martinien, c’est la solidarité pastorale, ou l’esprit de corps appliqué à la mission apostolique.
BONNE FÊTE À VOUS TOUS CHERS AMIS !
Mgr Jean-Marie Le Gall
