Lectio divina

Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.

« LE CHRIST-ROI VIENT À BOUT DE TOUT ! »

Lectio divina pour la solennité du Christ-Roi
Dn.7, 13-14 Apoc.1, 5-8 Jn.18, 33-37

Le Christ-Roi vient à bout de tout ! Même de l’Année liturgique qu’Il clôture solennellement. Double motif donc d’être dans la joie, l’exultation et l’action de grâce. A condition de ne pas se tromper de motifs.

« Ma Royauté ne vient pas de ce monde. »

Terminer en effet l’Année liturgique ne veut pas dire mettre un terme à sa sanctification ! Car le travail de con-formation au Christ en vivant de Ses Mystères historiques à travers le mémorial qu’en offre la Liturgie, ce travail reprendra dans huit jours avec le nouveau cycle que l’Avent ouvrira. Fêter le Christ-Roi, ensuite, n’est pas faire des sciences politiques ; il ne s’agit nullement de se ranger de quelque côté que ce soit au plan des institutions de gouvernement présentes, passées ou à venir. Le Christ l’affirme explicitement dans l’évangile : « Ma Royauté ne vient pas de ce monde. » C’est dire qu’il ne faut pas mêler monarchie et royauté christique ; elles ne s’appellent ni ne s’excluent car elles ne sont pas au même niveau d’appréhension.

La guerre de Succession…

En fait, la célébration de la Royauté du Christ se déroule en deux temps. Historiquement, la véritable liturgie où l’Église vénère la Royauté de Jésus, ce sont les Rameaux où est commémorée l’entrée solennelle du Christ sur la royale monture de l’ânon. Jésus est accueilli en Roi à Jérusalem, ville du Roi David. La liturgie des Rameaux fait mémoire, si l’on peut dire, de la guerre de Succession par laquelle le Christ ressort vainqueur du Malin dans le terrible combat de la Croix. Montant sur le Trône en Agneau vainqueur, Il délivre l’homme du pouvoir tyrannique des ténèbres et du péché. Nous pouvons relire à cette occasion Rm. 6 à 8 ou encore 1Cor 15.

…La guerre de Dévolution

La fête du Christ-Roi met en scène la guerre de Dévolution. Ce conflit se déroule toujours entre les forces du Mal et celles de la Grâce. Mais le théâtre des opérations n’est plus l’âme du Christ, désormais vainqueur et assis à la droite du Père. Le conflit se poursuit dans l’âme de l’homme. Si la victoire du Roi est définitivement assurée, c’est notre entrée dans le Royaume, notre possession de l’héritage, la dévolution pour nous des richesses éternelles qui est en jeu. Ce conflit, nous l’oublions souvent, est titanesque. Il met en jeu les mêmes forces projetées et les mêmes puissances activées que « du temps du Christ ». C’est normal puisque le chrétien appartient au Christ, est membre de Son Corps. Aussi les esprits mauvais disputent-ils férocement notre propriété à la Grâce qui, quoique toute puissante, ne s’impose jamais à notre liberté !

Du concupiscible à l’irascible et réciproquement…

Bernanos a magnifiquement dépeint cette lutte sans merci dans son œuvre romanesque laquelle, pour ma part, atteint la perfection dans L’Imposture et La Joie. Mais la Liturgie a également sa poésie et même, avec la Parole de Dieu qui s’achève dans l’Eucharistie, une efficace que les meilleurs auteurs ne pourront jamais partager !

La liturgie du Christ-Roi nous invite donc à regarder les Fins dernières non comme le but à atteindre, mais comme une réalité possédée ou du moins en état de réalisation. Comme le trekkeur au pied du mont le contemple et en savoure déjà, avec son concupiscible, la joie de la maîtrise. L’Avent au contraire, nous montrant les mêmes Fins dernières comme objectif à conquérir, jouera sur notre irascible.

Savoir contempler les œuvres de l’Alpha et Oméga…

L’objectif de cette mise en scène liturgique est de nous faire prendre conscience qu’effectivement, nous sommes déjà, en partie, en possession du terme. Nous sommes invités à voir ce qui est déjà en nous « libéré de la servitude » comme dit la Collecte. Non par nos propres forces, bien sûr, mais par l’effet de la grâce désirée, demandée, reçue et acceptée. Nous sommes priés de nous réjouir de ce qui en nous est passé sous l’ esclavage de la justice, et partage « les biens de l’unité et de la paix » (Prière sur les offrandes). Il s’agit en cette fin d’Année liturgique non pas tant d’avoir peur du jugement que de savoir reconnaître en nous l’œuvre de Celui qui est « l’alpha et l’omega » de notre cœur, et qui y règne, en proportion des ouvertures que nous Lui faisons.

Travailler sur nous dans la lumière de la Vérité !

Le Christ-Roi est l’heure de Vérité à faire sur notre intégration au Royaume. C’est le temps, durant cette semaine, de reconnaître que « Lui qui nous aime nous a délivrés de nos péchés », au moins d’un certain nombre de tics et de vices. En faisant le solde des comptes, en regardant ce qui, en nous, reste de ténèbres et d’hommerie adamique, nous pourrons, avec l’Avent, prendre les résolutions pour laisser le Christ poursuivre en nous le travail de sanctification. Attelons-nous donc à faire en vérité un bilan de l’Année liturgique qui vient de s’écouler afin de prendre les bonnes décisions de sanctification à l’orée de l’Année liturgique nouvelle. Ainsi, année après année, nous avancerons vers le Royaume. Et nous serons étonnés de voir, bilan après bilan, le règne de Jésus s’emparer de notre personne, âme, cœur et corps. A condition de travailler sur nous dans la lumière de la Vérité, cette Vérité profonde, divine, dont le Christ est venu témoigner et dans laquelle nous sommes invités à entrer pour y rencontrer Dieu.

Mgr Jean-Marie Le Gall

Communauté Saint Martin

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