Lectio divina

Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.

« QUE LA PAIX DU SEIGNEUR SOIT TOUJOURS AVEC TOI ! »

Lectio divina pour la solennité de la Nuit de Noël Année C
Is.9, 1-6 Tit.2, 11-14 Lc.2, 1-14.

Voici ce qu’a fait l’amour insigne de Dieu : une communauté, une ecclésia, une Église qui se rassemble en famille, en groupe, entre amis, et qui goûte, (au moins un peu mais j’espère beaucoup) une paix profonde, une unité véritable, une réelle communion.

 

Personne n’a le droit d’être heureux tout seul !

Oui, Raoul Follereau avait bien raison de souligner cette vérité profondément humaine : personne n’a le droit d’être heureux tout seul !

Et lorsque l’Église, chaque année, à Noël, lance son message de paix, lorsqu’Elle rappelle l’hymne des anges transmettant la paix de Dieu sur le monde de la terre, nous devons penser -et notre époque y est propice !- à tous ceux qui ne vivent pas dans la paix.

Ce n’est pas faire de la politique, que de rappeler les multiples conflits ethniques ou religieux qui sont éparpillés dans le monde, et font du monde une véritable bombe à retardement ! Il semble que ce vœu transmis par l’Église au monde à travers nous, reste sans effet, comme un vœu pieux…

A quelques jours d’entendre le message annuel du Souverain Pontife pour la paix, il ne serait pas inutile d’approfondir la relation qu’il y a entre Noël et la paix afin de mieux puiser les grâces de cette Liturgie pour transmettre, chacun à sa place, pour diffuser petit à petit, comme les ondes sous le vent, ce que nous aurons reçu nous-mêmes de Dieu.

« Que la paix soit avec vous ! »

Tout d’abord, Noël est la preuve que Dieu fait la paix avec l’homme. Ou, plus exactement, c’est la preuve que la promesse faite par Dieu à l’homme, dès après la chute (lorsqu’Il dit à Ève qu’elle écrasera de son talon le Satan), que cette promesse réitérée maintes et maintes fois dans l’Ancien Testament à travers les prophètes, s’accomplit aujourd’hui ; qu’effectivement le monde devient un monde où va régner « la paix sans fin. » Le monde devient le royaume du « Prince-de-la-Paix », cet enfant-Dieu.

Nous pouvons parler de preuves, car si nous avons les yeux suffisamment ouverts, nous contemplerons que Dieu devient nous-mêmes en se faisant homme. Il prend notre limon, notre argile, ‘Se crée Lui-même’ en quelque sorte comme Il a créé Adam et Ève, les façonnant, avec tout Son amour, toute Sa sagesse, toute Sa puissance, toute Sa paternité. Oui, voilà qu’à Son tour, dans le sein de Marie, Il ‘Se crée’, Se fait à notre image, avec notre pauvreté, pour S’unir à nous parfaitement et sans faux semblant…

« Soyez un comme nous sommes un… »

Croyons-nous sérieusement que cet encharnellement divin n’est pas signe d’amour ? L’amour de l’amant qui veut se faire comme l’être aimé, rejoindre sa nature, se mettre à son rang, s’abaisser dans sa pauvreté…

Croyons-nous que cela ne soit pas un signe de communion de la part de Dieu ? Croyons-nous que cela ne soit pas le premier pas vers la paix entre la divinité et l’humanité perdue ?

Comment pourrions-nous, après ce regard porté sur la crèche, penser, malgré toutes nos souffrances, que Dieu nous oublie, que Dieu nous est indifférent, qu’Il est indifférent à nos misères, qu’Il nous méprise, qu’Il est absent ? Pourrions-nous honnêtement, penser cela ?

Cette paix de Dieu proposée dans cette chair enfantine qu’est le Christ né de la Vierge Marie est le véritable et seul moteur qui peut mouvoir la recherche de la paix entre les hommes.

Tant que l’homme est seul, tant qu’il se voit seul et se sent seul, il n’a rien à perdre et tout à gagner dans un combat où il n’y a pas de règles, où tous les coups sont permis, un combat que nous ne connaissons que trop bien, dans le monde, un combat qui entraîne, ou qui use de l’injustice, de la haine, de l’hypocrisie, du mensonge, de la turpitude : sans Dieu tout est permis a-t-on pu déclarer avec une certaine justesse…

L’homme essaie alors de se construire, de se faire par lui-même, pour lui-même, en lui-même. Mais si mal, qu’en fait, il se déconstruit plus qu’il ne s’édifie !

« Comme le Père m’aimé, moi aussi je vous ai aimés ! »

Jusqu’au moment où retentit la Parole qui va traverser l’Histoire comme un rayon de lumière pour aller se nicher dans le cœur humain d’un Dieu…

Alors l’homme se redresse car il découvre qu’il est aimé de Dieu. Plus encore : non seulement il est aimé de Dieu, mais il est aimé par Dieu comme Dieu aime Son Fils puisqu’Il nous Le donne ! Puisqu’Il nous Le laisse ! Puisqu’Il nous Le transmet en héritage à travers l’Église, à travers l’Eucharistie, à travers notre Baptême !

Voilà quel est le véritable motif de la paix : la découverte, que nous devons faire honnêtement au cours de la Liturgie de Noël, d’un Dieu qui soit vrai.

Nous sommes trop souvent accusés d’avoir une religion fausse, parce que nous croyons en un Dieu faux où nous faussons le jeu de Dieu. Mais lorsque nous découvrons que Dieu est Amour jusqu’à se faire nôtre pour que nous vivions de Sa Vie, nous ne pouvons pas dire autre chose que ce Dieu d’Amour est un Dieu véritable !

Parce qu’il n’y a que l’amour de vrai. Il n’y a que l’amour qui compte et qui pèse. Et Il est tellement vrai ce Dieu, Il est tant Amour qu’Il est unique ! Il est le Dieu véritable, Il est le seul Dieu. Toutes les religions qui ont eu de multiples dieux n’ont eu que des faux dieux.

« Tu aimeras ton prochain comme toi-même. »

Si Dieu est unique parce qu’Il est vrai, et s’Il est vrai parce qu’Il m’aime et s’Il m’aime parce qu’Il m’a donné Son Fils, alors nous sommes tous fils du même Dieu et nous sommes tous frères ! C’est cela qui va nous faire comprendre et vivre la paix entre les hommes.

Souvenons-nous de cette prière que le peuple juif récite encore tous les jours : « Ecoute Israël, tu n’as qu’un seul Dieu : Dieu est unique et tu n’adoreras que Lui. Et le texte sacré ajoute fort logiquement : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même. » Pour cet amour de Dieu, pour cet amour du Dieu unique, qui t’a aimé jusqu’à te donner Son Fils.

Nous sommes frères. Non pas seulement frères de race, ce qui est déjà merveilleux, mais frères d’amour ! Tous capables d’attiser l’amour du Cœur de Dieu pour qu’Il vienne en chacun, oui en chacun, pour épouser chacun d’entre nous, et le revêtir de Sa beauté nuptiale.

« Que la Paix du Seigneur soit toujours avec toi ! »

En cette nuit de Noël, nous pouvons percevoir le fondement véritable de la fraternité humaine.

Sachant que depuis que Dieu s’est fait homme en Jésus-Christ, en Jésus comme en chacun, il y a la même image, il y a la même vie, vers Jésus et vers chacun, il y a la même tendresse qui se dirige, la tendresse du Père ; pour Jésus et pour chacun de nous, il y a la même fin qui est la gloire de Dieu !

Alors, comme cela doit être facile, en sortant de la messe de Noël, de retourner dans nos communautés de vie, dans nos familles, dans nos groupements et de nous dire les uns aux autres, sans hypocrisie : « Que la Paix du Seigneur soit toujours avec toi ! »

Que cela doit être facile de le dire et surtout de le vivre de sorte que de nos communautés, de nos groupements, de nos associations, de nos familles, la paix se diffuse pour atteindre par vagues successives le monde de la souffrance qui semble rester à l’extérieur du Royaume et qui crie vers nous son désespoir, sa pauvreté, sa mort…

Et nous sommes le seul message d’espérance ! Il n’y a que l’Église dans le monde, à cause de cette foi en l’Incarnation, qui peut dire à qui que ce soit, quelle que soit sa race et sa religion, du fond du cœur : « Que la Paix du Seigneur soit toujours avec toi ! »

Je vous souhaite de saintes fêtes de Noël et vous assure de ma prière dans l’Eucharistie offerte en ce jour à toutes vos intentions !

Mgr Jean-Marie Le Gall

Aumônier catholique

Hôpital d’Instruction des Armées de Percy, Clamart.

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