Lectio divina

Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.

« VIVRE LE VENDREDI SAINT DANS L’HUMILITE DE SE SAVOIR REPRESENTE PAR BARABBAS… »

Lectio divina pour le Vendredi Saint
Is. 52, 13-53, 12 Héb.4, 14-16 ; 5, 7-9 Jn. 18, 1-19, 42

Au Jeudi Saint nous avons tourné notre regard vers Pierre, pour nous aider à entrer dans la pleine compréhension du mystère eucharistique. La Messe, avons-nous vu, nous donne la grâce d’entrer dans l’intériorité des mystères du Christ pour recevoir l’Amour qu’ils contiennent tous et l’offrir humblement à nos frères comme le symbolise fortement l’attitude d’humble serviteur prise par le Seigneur au Lavement des pieds. En ce Vendredi Saint, tournons-nous vers Barabbas, personnage insignifiant et pourtant pivot de la Passion !

En Barabbas est présent notre vieil homme…

Barabbas est aujourd’hui celui qui nous représente : n’est-il pas en effet celui pour la libération duquel le Christ a été condamné ? Et s’il n’avait pas eu Barabbas sous la main, Pilate aurait-il eu une autre solution que de relâcher Jésus ? En Barabbas, nous étions bien là, désirés par le Père et par le Fils dans un même souffle d’espérance pour notre salut… En ce Barabbas, est présent notre vieil homme, si laid, car défiguré de sa vocation première d’enfant de Dieu. Il n’est plus vraiment homme.

Le Christ n’a plus figure humaine car Il est transfiguré par l’Amour !

En cela notre vieil homme rejoint le Serviteur souffrant. Lui non plus n’est plus homme, chante le prophète. Mais, si les fils d’Adam sont enlaidis par le péché, c’est au contraire parce qu’Il est l’Homme Nouveau, et pas seulement à cause de Ses souffrances, que le Serviteur n’est pas reconnaissable aux yeux des hommes pécheurs.

Allons plus loin : Ses souffrances sont là car il est l’Homme Nouveau qui veut faire « toutes choses nouvelles. » Le Christ, s’Il n’a plus figure humaine, c’est parce qu’Il est transfiguré par l’Amour.

« Son apparence n’avait rien pour plaire. »

Il n’est pas étonnant que le Serviteur soit comme une plante chétive puisqu’Il a été incarné, planté dans « la terre aride et sans eau » des hommes pécheurs. Il a vraiment revêtu la même chair que Barabbas !

Nous qui hésitons à revêtir un pauvre de notre vêtement, Il n’a pas hésité à prendre sur Lui la chair du criminel : « son apparence n’avait rien pour plaire. » Et pour cause !…

Il n’est pas seulement « semblable au lépreux » comme le suggère le chant du Serviteur. Lépreux, il l’est véritablement, ayant endossé dans Sa divine Personne tous les péchés des hommes : « C’était nos souffrances qu’il portait, nos douleurs dont il était chargé. » « Nos péchés l’ont broyé » : car ce n’est pas seulement la chair, mais bien toute la nature humaine avec son poids de péché que le Fils a assumée.

Nous passons de la mort à la Vie quand Dieu passe de la vie à la mort.

Oui, le Fils de Dieu a désiré être véritablement et totalement échangé contre Barabbas !  Soyons clairs : ce sont les Juifs, les hommes pécheurs, chacun de nous, qui demandent l’échange ! « Voulez-vous que je relâche le Roi des Juifs ? Non ! Pas lui ! Barabbas ! » Et Dieu Se soumet à notre horrible demande sachant que nous ignorons tout du don de Dieu et qui est celui qui demande à boire : « Père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font. »

C’est par cette blessure d’obéissance amoureuse à l’homme pécheur que Dieu nous guérit. Avec Barabbas c’est l’homme pécheur, chacun de nous, qui sort libéré de cet échange. Mais « le châtiment est tombé sur lui » et « le Seigneur a fait retomber sur lui les fautes de nous tous. » Ainsi, nous passons de la mort à la Vie quand Dieu passe de la vie à la mort.

« O admirabile commercium !… »

Oui, nous sommes libérés du joug de ce vieil homme qui inflige la mort à Dieu par son désir de puissance, par son refus de laisser Dieu vivre en nous le mystère de Son humilité et de Son abaissement ! Nous sommes libérés par l’Homme Nouveau qui s’accroche jusqu’à la fin, cum clamore valido, à la Volonté du Père pour ne pas laisser la mort de Dieu envahir Son être : « Et parce qu’il se soumit en tout, il a été exaucé. »

« Il a connu l’épreuve comme nous pour que nous connaissions sa paix… » O admirabile commercium !… Ô admirable échange d’un Dieu qui fait grâce et « justifie la multitude » !

Ô admirable échange d’un Dieu qui révèle Son image cachée sous les grimaces de la falsification et du mensonge ! Ô admirable échange d’un Dieu qui libère notre être filial et lui ouvre un avenir infini en Lui !

 

Dans une fraternelle union de prière avec et pour chacun, pour nos défunts, pour les souffrants, les malades et tous les pauvres que la société laisse sur le bord du chemin ! Saint Triduum !

Mgr Jean-Marie Le Gall

Aumônier catholique

Hôpital d’Instruction des Armées de Percy, Clamart.

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