Lectio divina

Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.

TROUVER LE CHRIST, C’EST FAIRE COMME LUI !

Lectio divina pour la Présentation du Seigneur
Mal.3, 1-4 Héb.2, 14-18 Lc.2, 22-40

Le temps liturgique de Noël s’est achevé avec le Baptême du Seigneur. Toutefois, l’Église conserve jusqu’au 2 Février le chant de l’Antienne Mariale du temps de Noël pour l’Office de Complies. C’est avec la Présentation de Jésus au Temple que l’Alma disparaît au profit de l’Ave Regina cælorum. C’est dire que la fête de la Présentation du Seigneur et de la Purification de la Vierge est vue comme une charnière permettant de fermer la porte du mémorial de Noël et d’ouvrir celle du Mystère pascal. Explication.

L’offrande de Jésus est filiale…

La Présentation de Jésus-Enfant, dans la lumière de Noël, est une anticipation et une figure de ce que sera la Présentation du Christ-Homme à la Croix dans les ténèbres du Mystère pascal. La première Présentation se fait, l’Enfant mené par Sa Mère. La seconde se fera, l’Homme, Ecce Homo, mené par la Volonté de Son Père : « Cependant non pas ma volonté, Père, mais la tienne… » C’est, dans les deux cas, la coloration filiale de l’offrande qui est le signe de la présence du Salut, comme le dit aujourd’hui Syméon.

C’est filialement qu’il nous faut nous offrir au Père

Cette attitude bien particulière d’offrande filiale, voilà ce qui fait Lumière pour nous ! Voie à suivre… Comme l’indique le cheminement des fidèles munis de la lumière des cierges, participation pauvre mais réelle à la Lumière de Celui que le cierge pascal symbolisera à Pâques. Il s’agit donc de s’offrir, et filialement encore ! D’ailleurs quand la monition initiale dit que cette fête célèbre le Christ venant à notre rencontre, c’est, sous-entendu, pour qu’Il nous emmène avec Lui dans ce mouvement d’offrande filiale qui s’achèvera à la Croix. C’est ce qu’annoncera Jésus : « Quand je serai élevé, j’attirerai tous les hommes à moi ! »

L’accomplissement de la Loi, c’est Jésus Lui-même

Par cet acte de Présentation, Jésus accomplit vraiment la Loi comme Il le dira durant Son ministère public : « Je suis venu accomplir la Loi et non l’abolir. » Il accomplit la Loi, non pas tant parce qu’Il est présenté (passivement) au Temple, que par ce que ce geste signifie. Il signifie ce qu’Il est et ce qu’Il mettra en avant à la Croix (activement), dans la reprise de ce mouvement d’offrande, à savoir l’Esprit filial qui Le pousse au Don vers le Père… Et le Don qui Le pousse à rendre l’Esprit au monde !

On remarquera d’ailleurs que le précepte de la loi du Lévitique concernant le rachat du premier-né pour la somme de 5 sicles d’argent est totalement occulté par Luc. Comme si l’évangéliste voulait nous montrer par là que l’accomplissement de la Loi se situe bien ailleurs : non dans la lettre mais dans l’Esprit !

Ce n’est pas parce que Luc est grec qu’il shunte délibérément les précisions judaïques, ni par insouciance ou paresse qu’il mélange dans une savante salade les règles de purification et celles du rachat du premier-né. C’est pour nous faire saisir que l’accomplissement de toutes ces lois, c’est Jésus Lui-même et non ce qui est fait à Son égard.

Débarrassé des détails juridiques, le récit peut ainsi exposer à nos yeux Jésus comme Celui qui vient racheter les pécheurs, au prix de Sa vie. C’est Jésus qui remplace de manière définitive les couples de colombes ou de tourterelles, les 5 sicles d’argent…

Jésus est moins offert qu’Il ne s’offre pour nous sauver

Pour ce faire, Jésus est porté par ses parents pour être présenté au Seigneur, comme une oblation. Dans la tradition hébraïque, la présentation est une action sacrée, liturgique, que nous retrouvons dans la présentation des oblats par le prêtre durant le sacrifice eucharistique.

Le mot de ‘présentation’ signifie non seulement l’acte du prêtre, mais également l’offrande elle-même, la victime offerte à Dieu. Ce petit Enfant, porté par Ses parents, devient ainsi soudainement, comme l’annonce Malachie (« Soudain… »), le grand Prêtre en même temps que la Victime pour présenter l’offrande en toute justice afin qu’elle soit bien accueillie du Seigneur.

Jésus n’est pas précisément racheté : c’est l’inverse ! Il est reconnu comme consacré. A la fois Saint de Dieu et mis à part pour Dieu. C’est pourquoi Son offrande nous rachètera tous. Nous avons ici la première actualisation de la Sainteté de l’Enfant annoncée par l’Ange à Marie : « Il sera appelé Saint. » Saint, Il l’était par Sa nature, Il n’avait donc pas à être sanctifié par une offrande à Dieu. Bien au contraire, c’est en S’offrant qu’Il sanctifiera ceux qu’Il n’a pas de honte à appeler Ses frères. Et c’est ainsi, assez curieusement et à front renversé pourrait-on dire, que la Loi s’accomplit…

Vivre la Présentation avec un œil sur le Mystère pascal

Alliance et Amour, Offrande et Purification : tels sont les thèmes de la fête du 2 Février et tels seront les thèmes de Pâques. La Présentation de Jésus est la première fenêtre qui s’ouvre, après Noël, sur l’accomplissement de la vie du Fils qui aura lieu à Pâques.

Oui, c’est vraiment dans ce contexte pascal que le 2 Février doit être vécu, ainsi que l’exprime Malachie lorsqu’il parle du « Messager de l’Alliance. » Nous quittons la douceur du temps de Noël pour initier notre montée vers Jérusalem. Oh, certes, le calendrier lunaire nous laisse encore quelques semaines de répit, en cette année 2020. Mais l’idée est bien celle-là : il faut déjà préparer le sac pour la route !

Notons encore que le texte prophétique nous renvoie très explicitement à la prédication du Baptiste, c’est-à-dire à la conversion et au Jugement de Dieu, à la purification du péché, à l’offrande juste présentée au Seigneur… En un mot, c’est le mystère pascal que Malachie, avant le Précurseur, annonce au cours de cette Liturgie.

D’ailleurs, la lecture des Hébreux confirme, si besoin était, cette évidence que c’est dans la couleur pascale que la Présentation doit être célébrée. Saint Bernard prêchait ainsi : « L’Enfant qui nous est né est appelé Sauveur au moment même où il est circoncis, car, versant pour nous ce sang pur, il commence à opérer notre salut. » (Sermon sur la Circoncision)

« …Et la vie était la lumière des hommes… »

C’est dire que si cette fête revêt un aspect lumineux (nos frères d’Orient la nomment « Fête de la Lumière ») cela doit être bien compris. Nous ne sommes point dans un éclaboussement de spots scintillants, comme le monde commercial le pratique dans le cadre des festivités de fin d’année. Nous ne sommes plus dans la célébration d’une lumière solaire, comme nous y invite le retour des fêtes païennes dédiées à la lumière et qui font la joie de nos municipalités en manque de distraction touristique…

C’est bien de Lumière pascale qu’il s’agit. Une Lumière qui n’est pas captive des ténèbres du Vendredi Saint, une Lumière qui a la couleur de Sang de l’Amour offert mais refusé, une Lumière qui éclaire en se consumant sans jamais s’éteindre ni disparaître, une Lumière qui révèle un Jour nouveau qui ne finit plus, une Lumière qui n’est pas le soleil, et cependant qui est, plus que lui encore, Vie de l’homme, dira saint Jean en son Prologue.

Trouver le Christ, c’est faire comme Lui

La monition initiale de la Liturgie nous incite à partir à la rencontre du Christ pour Le trouver. Trouver le Christ, c’est faire comme Lui, vivre comme Lui, selon les mêmes principes. C’est dire qu’il nous faut, nous aussi, nous présenter devant le Père, comme le Fils, en bons fils…

C’est le message de la Collecte. Oui, la Lumière nous est donnée pour qu’avec Son éclairage, nous puissions, nous aussi, présenter l’offrande pure de notre personne au Père, selon la recommandation de Paul aux Romains (12, 1).

C’est à cette purification des membres du Corps mystique que Luc songeait en écrivant que les jours étaient venus pour leur purification. Il s’agit de tous ceux qui, croyant en Lui, entrent dans cette démarche d’offrande filiale. La purification de nos cœurs s’est accomplie pour une fois en Lui, en Sa mort. Alors, ensevelis avec Lui par le baptême dans la mort, nous sommes appelés comme Lui, à ressusciter des morts pour vivre d’une vie nouvelle, à la gloire du Père. (Cf. Rm 6, 4)

Mgr Jean-Marie Le Gall

Aumônier catholique

Hôpital d’Instruction des Armées de Percy, Clamart.

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