Lectio divina

Une lectio divina est une commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposées par l’Église pour la Messe du jour.

Elie et la veuve de Sarepta (1R 17, 8-24)

Lectio divina pour le trentième deuxième dimanche 2015

N’AYEZ PAS PEUR !

Le tableau qui sera brossé dimanche prochain dans la première lecture n’est encourageant : pays de désert, pays de famine et de mort à laquelle ne semble pas pouvoir échapper une pauvre veuve et son enfant unique. Paysage dantesque représentant l’état de l’homme, l’état du monde que nous ne voyons que trop autour de nous: atmosphère de barbarie et de meurtres, de vol et de violence, de souffrance et de non-sens, mais surtout désespoir et angoisse de son cœur. C’est dans ce contexte de tristesse profonde qu’arrive un homme, un prophète envoyé de Dieu, pas tant celui qui prédit l’avenir que celui qui est chargé par Yahvé de proclamer le message divin de la Vie

Adam, où es-tu ?

Et nous retrouvons là l’essentiel du message chrétien : Dieu vient à la rencontre de l’homme enfermé dans sa solitude désespérée pour lui annoncer la Vie. C’est parce que Dieu est le Dieu des vivants (Abraham, Isaac, Jacob…) et non le Dieu des morts qu’Il engage ce gigantesque combat contre la mort assaillant l’homme depuis le premier refus opposé par la créature à l’amitié divine. Le véritable combat mené contre la mort n’est pas le nôtre ; il est d’abord celui de Dieu. Il engage toute Sa force, toute Sa Vie, tout Son Amour, toute Sa Sagesse pour délivrer Sa créature de la mort éternelle, c’est-à-dire de la séparation définitive de l’amitié divine qui s’appelle la damnation. C’est dans cette lumière surnaturelle, apaisante, que nous devrions toujours considérer l’approche de Dieu vis-à-vis de chacun de nous. Et pourtant, nous ne le faisons point. Lorsque Dieu s’approche, instinctivement nous reculons, nous nous cachons. Comme Adam au Paradis nous avons peur :  » Où es-tu ? J’avais peur, alors je me suis caché. « 

L’Amour fou de Dieu me cherche sans se lasser

Pourquoi avons-nous peur de Dieu qui, pourtant, nous propose Son amitié, une alliance d’Amour éternel même ? Nous avons peur car nous savons que Dieu ne se partage avec rien. Il est un tout, Il est le Tout, sans lequel tout n’est rien se plaisait à dire S. Augustin… Il est le Tout, l’infiniment parfait dans Sa lumière comme dans la chaleur de Son cœur ; Il ne se mélange avec rien.  Aussi, lorsque Dieu s’approche de moi pour me donner la Vie, lorsqu’Il court après moi pour me donner Son amitié, lorsqu’Il m’appelle, Il exige de moi une transformation. Cette transformation, c’est un dépouillement. Ce dépouillement va jusqu’à la mort.

« Je Suis le feu, tu es l’étincelle »

C’est pourquoi une des images représentant Dieu, que Dieu Lui-même utilise dans Sa Parole et que les mystiques reprendront, est celle du feu. Dieu est un feu. Un feu absolument lumineux, un feu qui réchauffe parfaitement. Un feu dans lequel Il nous demande d’entrer pour participer à Sa lumière, à Sa chaleur et qu’ainsi nous L’aidions à réchauffer le monde. Entrer dans le feu pour être feu, c’est à l’instar de la bûche de bois, mourir. Comme le bois se laisse grignoter, dévorer, comme il se laisse consumer et consommer par le feu, l’âme ne devient feu qu’en acceptant de disparaître dans le feu de Dieu. Voilà ce que Dieu exige de moi. Pour me redonner la vie, pour me faire entrer dans Sa Vie, Dieu vient à moi, Il vient en moi en exigeant de moi d’entrer en Son brasier, d’accepter d’être consumé. « Tout est consommé », dira JÉSUS en Croix… Tout est consumé par la divine flamme. Telle est la raison qui nous fait hésiter à nous en remettre à Dieu. Nous hésitons à entrer dans le brasier, à nous plonger dans le feu de Dieu. Aussi nous revêtons-nous souvent de combinaisons d’amiante : toutes nos justifications, nos excuses inventées (l’âge, le temps, les mœurs, la prévoyance…) pour ne pas nous laisser happer par le brasier divin.

Ne crains pas !

Aussi, chaque fois que Dieu s’approche de moi me dit-Il :  » Ne crains pas !  » Comme lorsqu’Il s’adressa à Marie :  » Ne crains pas, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu…  » Comme lorsqu’Il s’adressa à Pierre, lorsque, marchant sur les eaux, JÉSUS dit  » N’ayez pas peur, c’est moi…  » Comme lorsqu’Il s’adresse à chacun d’entre nous, quand, avec Elie, Il nous dit, comme à la veuve de Sarepta :  » N’aie pas peur…  » Le message de Dieu est toujours un message de Paix au contraire de celui du démon qui trouble et énerve. Le message divin tranquillise, pacifie en profondeur, les hauts fonds de notre cœur. Car même si le baptême que Dieu nous propose est, à l’image de celui de Son Fils, un baptême de sang instituant la « violence » du Royaume de Dieu, cela reste un baptême, c’est-à-dire un passage vers la renaissance, vers la Vie…
 » N’aie pas peur, Marie…  »  Et Marie donne la vie au Christ.
 » N’aie pas peur, Pierre…  »  Et Pierre donnera la vie à l’Eglise.
 » N’aie pas peur, petite veuve…  »  Et cette âme, notre âme, va revivre par sa jarre d’huile qui ne s’épuisera pas, par sa jarre de farine qui lui procurera le pain quotidien, symboles indissociables de la force de l’Esprit Saint et du Pain de Vie donnés au chrétien.
Chaque fois que se présente à nous un signe de Dieu – qu’il faut savoir discerner -, chaque fois que se présente à nous quelque chose qui va nous enlever à nous-même, qui va nous dépouiller, dont nous pressentons le travail intérieur d’enfantement, repensons à ces paroles que Dieu nous adresse dans le même moment : Ne crains pas !  Il nous les dit pour nous aider à faire un pas vers la mort à nous-même afin d’échanger notre vie contre Sa Vie !

« Tant que l’on a pas tout donné, l’on a rien donné ! »

Ce message, le Père l’a d’abord donné à Son Fils. JÉSUS s’est dépouillé par la mort de la Croix. Mais ce fut pour ressusciter et partager, en Sa nature humaine, la Vie en plénitude de Son Père. S’Il a accompli Lui-même cette transformation, c’est pour nous permettre de le faire à notre tour et en Lui. Parce que l’homme pécheur n’avait ni la lumière ni la force du cœur pour effectuer ce dépouillement, cette purification. Alors, Dieu est venu pour nous indiquer la voie de la Vie : « Je suis la Voie, la Vérité et la Vie. »
Et à la suite de JÉSUS, en JÉSUS, nous devons cheminer sur cette route de la transformation, donnant tout de nous-même comme JÉSUS a donné le tout de Sa vie : Sa chair et Son sang. Nous devons tout donner, à l’exemple de la veuve du Temple. Car, comme le soulignait la petite Thérèse, « Tant que l’on a pas tout donné, l’on a rien donné ! » Nous devons nous dépouiller non seulement du superflu, mais du nécessaire, de l’essentiel, de ce qui nous est le plus vital. Oui, nous devons donner tout ce qui est en nous, tout ce par quoi nous sommes nous-mêmes, ce à quoi nous sommes donc le plus attachés : notre je, notre personne.

« Celui qui meurt porte beaucoup de fruit »

Ce que nous aurons abandonné, au pied de la Croix sera baigné par le Sang vivifiant de JÉSUS. Et nous le retrouverons purifié par la Sainteté de Dieu et démultiplié par l’Infini de Dieu, accompli, achevé par la Perfection de Dieu. En effet, puisque Dieu est la Vie, tout ce qui Lui est abandonné nous est rendu, mais dans l’achèvement parfait, accompli par Dieu en nous, suivant le désir qu’Il avait de toute éternité sur nous. Lui seul peut nous faire atteindre l’achèvement qu’Il veut pour nous, brisant en moi, et avec moi, bien sûr, dans l’acquiescement total de ma liberté d’enfant de Dieu, toutes les préfabrications qui m’étriquent, m’enserrent, m’étouffent, donnant à mon âme Sa propre dimension divine !

Mgr Jean-Marie LE GALL, Aumônier catholique H.I.A Percy, Clamart

Lectio divina quotidienne (#twittomelie, # TrekCiel) sur Tweeter : @mgrjmlegall