Lectio divina

Une lectio divina est une commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposées par l’Église pour la Messe du jour.

Brueghel l’Ancien — Paysage de fleuve avec un semeur — XVIe s.

Lectio divina pour le douzième dimanche 2015

« JE PEUX TOUT EN CELUI QUI ME FORTIFIE… »

Avec ce douzième dimanche ordinaire, nous retrouvons le calme des prairies du temps en vert. Nous voilà à nouveau à l’écoute de Jésus qui nous enseigne, ce douzième dimanche, quelque chose de très utile et de bien particulier.

« Tout concourt au bien de ceux qui L’aiment… »

Si nous nous arrêtons à la Collecte, nous constatons un certain paradoxe : nous demandons à Dieu de nous faire vivre dans Son Amour, Lui qui ne cesse de nous guider… Pourquoi donc demander à Dieu de nous enraciner dans Son Amour ? Puisque nous savons qu’Il est le Maître de notre vie, notre guide et notre protecteur, ne sommes-nous pas automatiquement tournés vers Lui, notre Père ?

Nous faisons cette demande car, s’il est vrai que Dieu est présent à nous-mêmes, dans notre âme, dans le plus intime de notre cœur, même au milieu des tempêtes comme nous le rappelle l’Evangile de ce dimanche, il est tout aussi vrai que cette présence du Dieu invisible c’est donc la présence invisible de Dieu !

Cette présence n’est donc accessible qu’à ceux qui sont enracinés dans l’Amour de Dieu : « Tout concourt au bien de ceux qui L’aiment… » Autrement dit, les yeux de mon âme s’ouvrent et constatent cette présence de Jésus en proportion de la livraison que je fais de moi-même à Jésus, en proportion de la confiance que je Lui fais, en proportion de l’amour que je Lui porte.

Souvenons-nous des épisodes où Jésus ressuscité rencontre ceux avec qui Il avait vécu avant Sa mort : seule la foi aimante leur permet de Le reconnaître ! Une foi profonde, comme celle de Marie, la livraison du cœur, l’adhésion, la confiance, l’union du cœur à Son Cœur… Seule cet amour confiant peut me faire découvrir la réalité de Celui que j’aime. Et donc, tout particulièrement le lieu où Il se trouve. Nous le savons déjà au niveau des amours humaines : l’amour aiguise le regard et me permet de cerner, de connaître, de pénétrer la personnalité de celui que j’aime, de deviner sa présence. Seul l’amour donne la clairvoyance… C’est pourquoi nous demandons dans la collecte de vivre dans l’amour afin de détecter la présence de Dieu en notre âme.

« L’Amour du Christ me saisit »

Saint Paul ne s’y est pas trompé l’Amour du Christ le saisit et le fait devenir une créature nouvelle. Comme Paul, l’amour me fait voir le monde avec un regard nouveau qui transforme les réalités. Pourquoi ? Me rend-t-il plus intelligent ? Plus apte à maitriser le progrès ? Certainement. Mais surtout, et d’abord, cet amour que je porte au Christ me permet de saisir la personne de Jésus dans la réalité de Son être, et ainsi, de découvrir que cette personne de Jésus qui est mort pour tous est tout en tous, qu’Elle est en chacun et chacune, celui ou celle que nous rencontrons, comme, d’une certaine manière, en chacun des évènements qui forment notre vie.

Voilà la transformation du regard qui change la vision que le chrétien a du monde, qui change donc le monde, peut-on dire. Je ne vois plus seulement un homme : je vois Jésus en un homme. Je ne vois plus seulement une bourrasque qui emporte ma vie, une souffrance, un accident, une injustice ou n’importe quelle autre épreuve, mais, à l’intérieur même de cet évènement pénible, à l’intérieur de cette tempête, à l’intérieur de ma barque si fragile, remuée sur les vagues, avec les hauts et les bas des sentiments de mon cœur et de ses succès, avec les variations de mon travail et de tout ce qui me ballotte, même dans cette bourrasque, Jésus est là. Il dort, mais Il est là. Dans ma barque, dans la barque de la cité comme dans celle du pays, dans la barque de l’Eglise, quelles que soient les crises : Jésus est là !…

« Que veux tu que je fasse pour toi ? »

Et que m’apporte la constatation de cette présence ? M’apporte-t-elle la certitude que la tempête va se calmer ? Me fait-elle espérer le renouvellement du miracle de Jésus ?

La présence de Jésus ne calme pas la tempête. Je veux dire par là que la présence de Jésus dans le monde comme en chacun d’entre nous n’enlève pas forcément les guerres, les souffrances, les injustices. Parce que Dieu laisse l’homme agir librement. Il n’y a pas moins de guerres, pas moins de souffrances, pas moins d’injustices depuis que Jésus est mort sur la Croix. Mais en ces multiples tempêtes, il y a une présence qui relativise la force des coups de vent en les mettant en perspective par rapport à Quelqu’un d’autre…

Car, lorsque je saisis la présence de Jésus en moi, qu’est-ce que je saisis en fait ? Le Royaume de Dieu, l’union de mon âme à Dieu ! En effet, je suis établi dans une union de cœur avec Dieu présent en mon âme, présence(,) qui m’est révélée par l’amour que je porte à Jésus et qui me Le fait découvrir en moi-même. La seule condition pour que le Royaume soit en moi, y demeure et grandisse, c’est cet amour qui m’unit à Dieu.

L’Amour qu’Il me porte en premier, dira Jean, et dont je suis certain puisque « Dieu a tant aimé le monde qu’Il a donné son Fils pour que le monde soit sauvé » ; l’amour que moi, ensuite, je Lui porte grâce au don de Son Esprit.

Si j’accepte Son Amour en Lui rendant mon amitié, je sais alors que malgré les tempêtes et les bourrasques, Il est là, et que rien ne peut me séparer de cet Amour de Jésus, de cette union des cœurs. Rien, dit saint Paul : ni les anges, ni la mort, aucune tempête, aucune bourrasque… Je peux être au chômage, je peux être sur un lit d’hôpital, je peux être dans une souffrance extrême, une souffrance qui tenaille mon corps et toutes mes fibres, une souffrance que l’on doit respecter… même dans cette souffrance, dans cette injustice, dans cette vague qui paraît m’engloutir, il y a toujours Jésus au fond de mon cœur. Aucune tempête ne peut aller contre cet Essentiel qu’est l’union de mon âme à Dieu. Rien. Sauf ma seule volonté.

« Ainsi vous entrerez dans la plénitude de Dieu »

Cela fait que les tempêtes du monde, les haines et les guerres, les différents problèmes de notre univers humain peuvent me toucher de très près sans pour cela jamais entrer dans mon cœur. Mon cœur est greffé sur l’Essentiel, et tout le cortège qui, en général, accompagne ces problèmes, angoisses et inquiétudes, pessimismes, voire suicides moraux, intellectuels ou même physiques, tout cela est impuissant à briser l’Amour qui me relie à Dieu. Autrement dit : rien de cela ne pénètre mon cœur. Autrement dit, encore : je relativise ma souffrance, l’épreuve qui est là tout en restant à la porte de mon intimité car impuissante à briser la paix du Royaume intérieur. Certes je souffre, certes il y a tempête, certes l’Eglise est ballottée dans un monde en crise, certes existe tout ce que l’homme peut imaginer dans sa capacité de haine, mais, à l’intérieur de mon cœur reste cette paix que personne ne peut m’enlever.

Ce n’est pas une paix égoïste. C’est au contraire, dans la mesure où je garde cette paix, cette tranquillité intérieure, que je peux comprendre et aider à guérir les plaies et les problèmes qui m’entourent.

« Demeurez dans mon Amour »

Voilà l’enseignement de ce passage d’évangile. Nous voyons alors combien il est important de demander à Dieu de vivre dans Son Amour. Cela me permet de détecter la présence de Jésus en mon âme ; présence qui ne dépend que de la charité que je Lui porte ; présence qui me certifie donc que les bourrasques, les tempêtes de ma vie, toutes les épreuves ne sont finalement que des écumes qui passent et se brisent sur le rocher du Christ qui est en moi (St Benoît), qui me prend et qui me serre bien fort contre Lui et qui m’assure ainsi dans Sa paix. Ce qui n’empêche pas l’épreuve ni la souffrance… Mais au fond de moi, il y a ce point d’ancrage : Il est là, Il m’aime et je suis avec Lui.

Mgr Jean-Marie LE GALL, Aumônier catholique H.I.A Percy, Clamart

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Bien chers lecteurs,

L’été approche et je vous invite donc à nous retrouver à la rentrée après un repos qui, pour être réparateur, doit se situer en Dieu, car dit le Psaume : « In Deo vera quies… En Dieu seul le vrai repos ! » (Ps.61)

En attendant, vous pouvez continuer à approfondir la Parole liturgique en vous rendant aux adresses suivantes :

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