Lectio divina

Une lectio divina est une commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposées par l’Église pour la Messe du jour.

Lectio divina pour le 4ème dimanche de Carême

J’ATTIRERAI TOUT A MOI !

Nous voici en plein Carême et voilà que durant ce quatrième dimanche réapparaissent les fleurs, la musique, tous ces éléments sensibles qui sont le signe de la joie. Leur présence devrait nous heurter, nous qui depuis trois semaines sommes entrés dans la recherche de notre péché, dans la purification, dans l’ascèse, dans un effort de prière, de solitude et de partage. Oui, au moment où nous apercevons que ce que nous prenions pour quelque mauvaise habitude sans importance s’avère un vice profondément enraciné et que vivre de la grâce se montre difficile, c’est alors que l’Eglise fait retentir l’orgue et fait refleurir l’autel !

Rien ne peut m’empêcher de rejoindre Dieu

S’il y a aujourd’hui la présence de cette sensibilité, c’est parce qu’il y a une raison : l’Eglise nous fait découvrir la profondeur de l’Amour de Dieu. Et cette découverte est la cause de notre joie, de notre exultation qui se traduit en fleurs et en musique… Pourquoi l’Eglise nous fait-elle découvrir d’une manière toute particulière aujourd’hui l’Amour de Dieu ? Pour nous empêcher de nous décourager, pour nous empêcher d’arrêter notre marche vers Pâque, elle excite notre ferveur en nous dévoilant comment Il nous aime.

Mais ce dévoilement de l’Amour de Dieu est surtout là pour nous montrer que rien ne peut empêcher notre âme de rejoindre Dieu. Car il serait normal qu’au bout de ces trois premières semaines de Carême nous désespérions, au vu de nos lâchetés, de voir Dieu. Lorsque nous aimons quelqu’un et que nous nous rendons compte que, malgré cet amour, notre vie n’est qu’un tissu de trahisons, nous désespérons alors de nous faire aimer de lui, même si l’on sait son amour très grand ! C’est pour cela que l’Eglise vient à nous avec ce message merveilleux de la mi-Carême : le péché, quelle que soit sa gravité, ne sera jamais un obstacle à notre rencontre avec Dieu. Plus : ce péché, cette lâcheté, ce sac de trahisons que nous traînons derrière nous, sur notre dos, provoque non pas l’Amour de Dieu – celui-ci est toujours premier – mais Sa miséricorde.

Notre péché en effet ne cause pas l’Amour que Dieu nous porte, mais il le teinte de cette couleur extrêmement délicate qui rend l’Amour encore plus beau (si cela était possible en Dieu !) encore plus subtil, cette couleur qu’est la miséricorde divine. Comme nous le rappelle Paul : « Dieu a tant aimé te monde qu’Il a envoyé Son Fils pour que nous, qui étions morts par nos fautes, nous retrouvions la vie. »

Mon péché est un instrument de la gloire divine !

Plus nous sommes misérables, plus il est beau pour Dieu que nous ayons confiance en Lui ! Et aujourd’hui, Dieu nous l’affirme en nous disant que c’est dans notre misère que Son amour se glorifie. Il nous aime, non parce que nous serions saints et purs, Il nous aime malgré et au-delà de notre faiblesse humaine. Non seulement notre péché n’est pas un obstacle à Son amour, mais il est l’instrument de Sa gloire. Regardons comment Il agit envers nous, à l’opposé de ce que nous faisons envers les autres : Il s’approprie notre faiblesse ! MA faute n’est pas un obstacle à Son amour, Il me LA montre (comme si elle était Sienne et, de fait, Il la fera Sienne sur la Croix) comme étant le trône de Sa miséricorde.

C’est vrai que Dieu ne sait pas regarder nos fautes comme un obstacle à Son amour; c’est vrai que pour Lui notre péché est un catalyseur de Sa tendresse paternelle : c’est l’objet de la première lecture de ce 4ème dimanche. En fait, cette histoire pourrait sembler nous dépasser infiniment si nous n’en faisions pas l’image de NOTRE histoire à nous. C’est l’histoire de notre temps, comme c’est l’histoire de TOUS les temps ; ces temps où les prêtres et le peuple trahissent par le péché la divinité dans le Temple qui lui est consacré. Dieu, par pitié pour Son peuple, envoie des prophètes pour prévenir, pour redresser, pour éduquer et guérir. Et ces prophètes sont massacrés. Puis, comme conséquence du péché, il y a l’exil en terre païenne. Malgré cela, Dieu n’oubliera pas Son peuple et entendra ses plaintes et son repentir. Comme nous l’avons vu pour le 3ème dimanche, Dieu va de nouveau se définir comme Celui qui libère Son peuple de l’oppression, à travers Cyrus qui décrète le retour à Jérusalem, le retour vers le Temple, le retour dans l’Alliance.

Cyrus est l’image de JESUS qui donnera au peuple la possibilité d’entrer à nouveau dans la Maison du Père, la nouvelle Jérusalem.

Jésus ressuscite jusqu’à la fin du monde

Cette histoire d’Israël qui annonce la Rédemption par Jésus-Christ, c’est-à-dire la libération du mal, la libération du péché, c’est aussi l’annonce ou la figure de nos propres vies. Car nous aussi, malgré Sa mort et Sa Résurrection, nous continuons à vivre du péché. Nous continuons à massacrer les prophètes -les saints- qui sont devant nous ; nous continuons à massacrer l’Eglise dans son enseignement et dans sa sainteté ; nous continuons à nous massacrer nous-mêmes en vendant JESUS pour trente deniers d’argent. Comme nous l’a rappellé si souvent Saint Jean-Paul II : nous vivons dans une structure de péché, d’Israël à nos jours. Et c’est pour cela que nous avons tant de mal à en sortir…

Et malgré cela, malgré cette mort de Jésus sans cesse réalisée devant nous (PASCAL disait que JESUS est en agonie jusqu’à la fin du monde), parce que Dieu est riche en Miséricorde, JESUS va aussi ressusciter jusqu’à la fin du monde ! Sans cesse, par l’intermédiaire des mains sacerdotales, JESUS va s’élever au-dessus de l’autel. Ainsi concrétisera-t-Il jusqu’à la fin du monde Sa Parole : « Comme le serpent de Moïse, ainsi faut-il que soit élevé le Fils de l’Homme. » Ce n’est pas seulement une fois que JESUS meurt et ressuscite : c’est chaque fois que le mystère de l’Eucharistie est célébré, ainsi que nous le chantons dans l’anamnèse : « Nous proclamons Ta mort, nous célébrons Ta résurrection jusqu’à ce que Tu viennes. »

« Celui qui croit aura la vie »

Voilà le motif de notre Joie en ce dimanche de Lætare. Quelle que soit notre trahison et la profondeur dans laquelle nous sommes tombés, dans ce monde de structure de péché, Jésus est toujours là, élevé de terre pour sauver chacun et chacune d’entre nous : « Celui qui croit en Lui aura la vie éternelle. » Voilà le motif de notre joie : nous ne marchons pas vers notre condamnation; nous marchons, au contraire, vers la réconciliation, vers le baiser du pardon de Dieu !

« Celui qui croit aura la vie. » Comme c’est aisé d’être pardonné ! Qui ne croit pas assez pour ne pas pouvoir prétendre au pardon ? Mais si la foi assure ma réconciliation, pourquoi avoir besoin d’un ministre, de quelqu’un qui est là pour me servir ? Justement le ministre sert à compléter l’aspect subjectif et naturel de la démarche (ce besoin que j’ai d’être purifié), en la foi objective et surnaturelle dans le pardon divin. PASCAL disait : « Pour être un saint, il faut la grâce ; ne pas l’admettre c’est ignorer ce qu’est un saint et ce qu’est un homme. » Lorsque nous refusons donc la présence objective de la grâce, c’est que nous ignorons qui nous sommes et ce que nous devons devenir. Paul nous la rappelle à deux reprises dans la lecture, cette nécessité de la grâce : « La grâce est le moyen de notre salut… C’est par la grâce que nous sommes sauvés… C’est par Jésus-Christ, par le don de Sa grâce. »

C’est bien de cela d’ailleurs qu’il s’agit quand Jésus affirme : « Celui qui croit aura La vie. » Il s’agit de croire en mon état de pécheur, en la miséricorde de Dieu et en ce troisième élément que Jésus annonce quand Il dit, en entrant à Jérusalem : « Quand je serai élevé, j’attirerai tout à moi. » Ce troisième élément est la rencontre intime et personnelle que JESUS veut avoir avec chaque pécheur pour lui donner la grâce dont il a besoin, travers la présence sacramentelle de Dieu. C’est pour cela que le Père L’a envoyé, c’est pour cela qu’Il est venu… Autant d’expressions qui donnent la raison profonde de l’Incarnation : l’humanisation de Dieu, le contact sensible entre Dieu et l’homme. C’est ce contact guérisseur que le sacrement de Réconciliation donne à mon âme à travers la présence ministérielle du Christ signifiée par le pardon donné par le prêtre. JESUS attire le pécheur par l’intermédiaire du prêtre et lui donne cette grâce de résurrection.

Recréé avec le Christ afin de vivre pour Dieu dans la joie

Quelle grâce ? Cette force divine propre à me faire entrer dans le mécanisme de la sainteté et non pas à blanchir juridiquement une erreur de conduite. C’est cette grâce-là qui me fait entrer dans la conformité à la voie que Dieu a choisie pour moi (ainsi parle Paul) c’est-à-dire qui me permet de lutter contre cette faute que je viens de déposer dans le Cœur de JESUS. C’est cela qui me fait ressusciter : cette réalité objective du sacrement qui dépasse infiniment le contentement psychologique que je peux avoir en effectuant une telle démarche. « J’attirerai tout à moi. » Je dois, en tant que pécheur, si je crois vraiment à la Vérité de la Parole de Dieu, être attiré par JESUS et me rendre à ce dialogue d’intimité que le Christ me propose par Son ministre. C’est pour cette raison que la joie chrétienne ne se goûte vraiment que dans l’expérience concrète du pardon demandé et reçu.

C’est pour cela aussi qu’en dehors du sacrement de Réconciliation, nous ne pouvons pas, de manière ordinaire, recevoir la grâce appropriée à l’état de pécheur que nous venons de reconnaître et donc nous ne pouvons nous rendre plus conformes à la voie que Dieu a choisie pour nous.

Pendant ces trois premières semaines de Carême, nous avons fait l’effort de rechercher et de reconnaître les manquements, les faiblesses, les dérapages de notre vie. Maintenant, il nous faut faire cette démarche personnelle d’enfant de Dieu, allant vers le Père par le Fils, à travers le prêtre. Pour recevoir par l’absolution, non pas une régularisation juridique et formelle, mais pour recevoir une réalité objective qui est la vie même de JESUS, faite pour nous remodeler selon son exemplarité sur tel ou tel point de notre vie qui est incohérent avec l’Evangile.

Profitez donc des temps de réconciliation qui vous sont proposés dans vos paroisses pour vous présenter à JESUS afin que votre vie pascale soit une vie véritablement rénovée.

Mgr Jean-Marie LE GALL, Aumônier catholique H.I.A Percy, Clamart

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