Lectio divina

Une lectio divina est une commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposées par l’Église pour la Messe du jour.

Lectio divina pour le 2ème dimanche du Temps Ordinaire

LE PRETRE, UN HOMME POUR LES HOMMES…

Durant le deuxième dimanche ordinaire nous demanderons à Dieu de donner à notre temps la grâce de la paix. La paix n’est pas seulement une pure absence de conflits. La paix n’est pas un concept négatif. La paix est le fruit de l’ordre voulu dans le monde par le Créateur : quelque chose de positif, et qui se construit. Comme c’est l’homme qui est la tête de la création (nous le savons par le récit de la Genèse qui met l’homme au sommet de l’œuvre des six jours) c’est lui qui est le maître de cette construction de la paix et c’est en lui que la paix doit d’abord se construire. D’où l’Église et ses prêtres.

Quelle est la vocation de l’homme ?

La première lecture indique trois traits essentiels. Samuel se tient devant le Seigneur (« Me voici ! ») : l’homme doit être présent devant Dieu. En fait, toute créature est présente à Dieu puisque Dieu est partout, que Dieu même est présent en tout( )… Ce qui caractérise l’homme, c’est qu’il faut, non seulement qu’il soit présent, mais aussi qu’il écoute : « Parle, Seigneur, ton serviteur écoute. » Ecouter, c’est mettre en acte une capacité spécifiquement humaine.

Le récit va plus loin. Parce qu’avec cette dénomination de serviteur, on pourrait penser que l’homme finalement ne doit écouter que des ordres, à la manière d’un esclave qui se tient présent aux pieds de son maître, pour entendre ce qu’il doit faire, le récit se termine en disant : « Samuel grandissait, le Seigneur était avec lui et aucune de ses paroles ne demeura sans effet. » Ainsi, ce qui distingue l’homme de l’esclave, c’est que l’homme désiré par le Créateur est appelé à grandir, et non à rester au niveau d’une nature sous-développée, dans une condition d’esclavage.

Voilà ce que l’homme doit comprendre grâce à la Parole de Dieu : il est appelé à se lever et marcher vers le Père : « Lève-toi, prends ton grabat et marche ! »

Vouloir ce que l’on peut…

Nous comprenons alors l’importance du concept de liberté car l’homme ne peut grandir que s’il est libre, ce qui est la caractéristique de celui qui n’est pas soumis à l’esclavage… C’est cela qui fonde le droit de l’homme à la liberté. L’homme, dès qu’il vient à l’existence se possède lui-même, il est maître de son destin. Il est là pour grandir, pour se construire, pour se développer, pour s’épanouir, pour devenir ce qu’il est, selon la formule de Pindare : un homme. C’est pour cela qu’il est créé être spirituel, c’est-à-dire libre.

La liberté, ce n’est pas pouvoir ce que l’on veut, mais vouloir ce que l’on peut. Ma liberté, c’est me responsabiliser en face de mes capacités, c’est vouloir faire jaillir de ma nature humaine sa propre perfection. Personne n’a le droit d’attenter à la liberté humaine, car, ce faisant, on attente à ce droit fondamental qu’est le droit au développement de la personne, à l’épanouissement dans la ligne de la vocation initiale de l’homme. Aucune opinion, aucun privilège, aucune philosophie, personne et encore moins aucune société n’a le droit de toucher à ce droit fondamental au développement et aux droits qui en découlent dont le premier est, bien sûr, le droit à la vie.

Et l’Eglise qui a pour mission d’éclairer l’homme et de le défendre ne peut pas ne pas lutter pour éviter que les hommes se rabaissent en dérogeant à cette inviolabilité de la personne humaine. C’est son rôle et l’Eglise tient à le remplir malgré les oppositions et les difficultés. Elle se fait un devoir de rappeler constamment aux gouvernements, aux populations ce droit de l’homme à être libre c’est à dire à s’épanouir en fonction de ce qu’il est et non en fonction de ce qui lui plaît.

L’Église, experte en humanité…

L’Eglise le fait d’autant plus facilement qu’elle a derrière elle la Révélation qui l’éclaire profondément sur la nature de l’homme et la rend experte en humanité. Regardons par exemple ce que saint Paul révèle au cœur de l’Eglise. La vie dans son existence et sa potentialité de développement est un don de Dieu : « Vous ne vous appartenez pas. » La vie dans son existence et sa potentialité est la vie même de Dieu : « Vous êtes le temple de l’Esprit-Saint. » La vie dans son existence et sa potentialité est tournée vers Dieu : « Rendez gloire à Dieu … »

La société ne peut être comprise, ne peut se justifier que dans la mesure où elle a la personne humaine comme fondement et comme fin. La société est faite pour la personne, pour son épanouissement. La morale sociale est là pour éduquer tous les citoyens à ces droits et à ces devoirs en fonction de cet appel fondamental à s’épanouir au soleil de la nature. Et la loi est là pour organiser entre eux ces droits et ces devoirs, pour les faire respecter par tous et pour tous.

Au-delà de cette analyse naturelle, l’analyse chrétienne, avec ce que l’Eglise possède comme éclairage de par la Révélation, confirme cette inviolabilité de la personne humaine dans son existence comme dans sa potentialité à grandir, car cette vie est un don de Dieu. L’analyse chrétienne m’éclaire surtout sur cette vie puisque c’est la vie de Dieu et que l’Eglise est seule détentrice de ce que Dieu lui a dit de Lui-même.

Aussi peut-on dire que l’Église (qui est une société surnaturelle à l’image de la société civile, mais à un niveau transcendant), a pour fondement et pour fin elle aussi la personne humaine. Oui, c’est bien pour l’homme que l’Eglise fut inventée par Jésus : pour l’homme et non pour Dieu… C’est l’homme qui est l’objet de l’attention de l’Eglise, comme cela devrait être le cas de toute société civile. Si la société empêche l’épanouissement de l’homme, elle perd sa légitimité et elle perd sa raison d’être. Non seulement elle est inutile, mais elle est nuisible. Ainsi l’Église est faite pour le bonheur total de l’homme. Car Dieu n’a d’autre joie que de donner Sa Joie ! Nous ne donnons pas à l’Eglise pour que celle-ci transmette à Dieu notre don, comme dans les religions païennes. L’Eglise ne nous dépouille pas pour habiller Dieu. Au contraire c’est Dieu qui se dépouille à travers Son Église pour nous revêtir, à travers elle, de Sa richesse, de Sa Vie qui est Amour, Don et donc Pauvreté : « Lui qui était riche s’est fait pauvre pour vous enrichir de Sa pauvreté… » dira Paul.

« Veni ut serviam » : la grandeur de la vocation apostolique

Regardons comment Jésus prend notre vocation au sérieux : Il va choisir des hommes (nous en avons les prémices dans l’évangile) qui ne seront qu’au service des hommes et de leur vocation à grandir. Impossible de trouver une autre institution dans laquelle on trouve un tel désintéressement, un tel service institué, un tel dévouement voulu et organisé ! Ceci bien sûr, au niveau théorique, parce qu’en pratique, nous savons bien que nous ne sommes pas des saints et que nous sommes loin d’être à la hauteur de notre tâche… Oui, rendons-nous compte que Jésus prend, au milieu des hommes, des hommes pour les hommes ! Il leur retire la possibilité de goûter à certaines joies légitimes pour être au service de leurs frères, pour servir leur développement, leur maturité, leur grandeur… Et le développement de ces hommes, l’épanouissement de ces apôtres est fonction du développement des âmes qui leur sont confiées ! L’apôtre ne vit que pour cela reconnaîtra Paul, pour avoir part à l’évangile lui aussi ! Oui, les pasteurs de cette institution surnaturelle et divine qu’est l’Église sont là pour servir. Ainsi que le dit Jésus si souvent : « Je ne suis pas venu pour être servi mais pour servir… ! «  « Celui qui voudra devenir grand parmi vous sera votre serviteur et celui qui voudra être le premier d’entre vous sera votre esclave… »

Oui, il y a des guides dans l’Eglise, des pasteurs qui quelquefois rappellent à l’ordre. Mais ils sont là pour le service des baptisés. C’est eux qui aideront chacun à trouver son épanouissement d’homme, épanouissement naturel comme surnaturel qui assume et transcende le premier. Ils aideront les hommes en leur annonçant cette Parole divine qui fit grandir Samuel. Ils les aideront en leur donnant la force de se conformer à cette parole, de l’accomplir en eux, de la rendre efficace par les sacrements, de l’incarner en quelque sorte, en devenant ainsi d’autres christs… Enfin, ils les aideront en étant à l’écoute de leurs difficultés, de leurs souffrances, de leurs joies… C’est pour cela que le prêtre existe. Le prêtre n’a pas d’autres buts dans sa vie, pas d’autres intérêts, pas d’autres désirs… La vie du prêtre est une pro-existence disait Saint Jean Paul II ! Le prêtre est un homme pour les hommes, un homme pour que les hommes grandissent sous le soleil de Dieu et trouvent ce plein épanouissement que l’on admire chez les saints.

Mgr Jean-Marie LE GALL, Aumônier catholique H.I.A Percy, Clamart

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