Lectio divina

Une lectio divina est un commentaire biblique sous le mode d’une lecture spirituelle et priante. C’est une méditation sur les textes de l’Écriture Sainte proposés par l’Église pour la Messe du jour.

L’ESPRIT EST LA LOI DU CHRETIEN !

Lectio divina pour le 31ème Dimanche Ordinaire

Deut. 6, 2-8 He. 7, 23-28 Mc. 12, 28-34

Pour comprendre, dans l’évangile de ce 31ème Dimanche Ordinaire, le sens de la question du scribe et de la réponse de Jésus, il faut savoir que dans le judaïsme au temps de Jésus il existait deux tendances opposées : d’un côté les pharisiens avaient tendance à multiplier sans fin les commandements et les préceptes de la loi, en prévoyant des normes et des obligations pour les moindres détails de la vie. De l’autre on ressentait le besoin opposé de découvrir, au-dessous de ce monceau asphyxiant de normes, les choses qui comptent vraiment pour Dieu, l’âme de tous les commandements.

Rechercher l’essentiel de ma vie

La demande du scribe et la réponse de Jésus s’insèrent dans cette recherche de l’essentiel de la loi, pour éviter de se perdre dans mille autres préceptes secondaires.

C’est précisément cette leçon de méthode que nous devrions d’abord apprendre de l’évangile de ce jour. Certaines choses dans la vie sont importantes mais pas urgentes (dans le sens que si on ne les fait pas, il ne se passe rien de visible) ; d’autres, en revanche, sont urgentes, mais ne sont pas importantes. Le risque que nous courons est de sacrifier systématiquement les choses importantes pour pouvoir répondre aux choses urgentes, souvent totalement secondaires. Par exemple sacrifier le temps de prière pour rattraper un retard dans son travail…

L’histoire des gros cailloux

Il nous faut donner, dans notre vie, la priorité absolue aux choses importantes qui décident de notre raison de vivre, de l’orientation de notre vie… Souvenons-nous de cet exemple du vase qu’il faut remplir d’eau, de gros et de petits cailloux. Cette expérience nous démontre que si l’on ne met pas d’abord les gros cailloux dans le vase pour terminer par les petits puis par l’eau, on ne réussira jamais à les faire entrer par la suite.

Quels sont les gros cailloux, les priorités, dans notre vie ? La santé ? La famille ? Les amis ? Défendre une cause ? Réaliser une chose qui nous tient à cœur ? L’important est de mettre d’abord ces gros cailloux dans notre agenda. Si l’on donne la priorité à mille autres petites choses (le gravillon, le sable) l’on remplira sa vie de futilités et l’on ne trouvera jamais le temps de se consacrer aux choses vraiment importantes. N’oublions donc jamais de nous poser régulièrement la question de savoir quels sont les gros cailloux de notre vie, pour les mettre à la première place dans notre agenda.

Et quels sont les deux gros cailloux du chrétien ?

Les plus gros de tous les cailloux, ceux qui doivent être déposés au fond du vase avant même mes « gros cailloux » (la santé, la famille, les amis, etc.…) sont les deux plus grands commandements : aimer Dieu et aimer le prochain.

Or, ce qui est étonnant, c’est que ces deux plus grands commandements, n’appartiennent pas au Décalogue. Jésus se serait-Il trompé ? Voulait-Il ajouter deux commandements nouveaux ? Non !

Ces deux commandements de l’amour de Dieu et du prochain n’appartiennent pas au Décalogue car ils sont en amont de ces dix Paroles de Vie. Les dix commandements sont seulement une explication pratique et détaillée de ces deux là qui sont comme les Paroles source de toute notre vie, si nous voulons que celle-ci soit à l’image de la Vie divine. Comment aimer Dieu ? En respectant les trois premiers (adorer, jour du Seigneur, ne pas avoir d’idole). Et comment aimer le prochain ? En ne mentant pas, en ne convoitant pas, en ne prenant pas son bien, en le respectant etc…

Tout voir à l’aune de notre amour…

Conséquence pour notre examen de conscience : tout voir à la mesure de notre amour

Ce qu’il faut comprendre, c’est que les deux plus grands commandements que Jésus donne sont la lumière et l’énergie dans laquelle il nous faut vivre les autres.

Aussi, lorsque nous faisons notre examen de conscience, il ne suffit pas de se poser la question de savoir si on est allé à la messe du dimanche. Il faut se poser la question du comment et du pourquoi. Comment ai-je aimé Dieu en sanctifiant mon dimanche : suis-je allé à la messe par devoir, par obligation ? Suis-je au contraire allé à la messe comme à un rendez-vous d’amour, en y mettant tout mon cœur, en me faisant propre (confession), en me préparant à ce que je dirai à la Personne aimée que je vais rencontrer (préparation des textes liturgiques) etc… ?

Il me faudra également me demander comment ai-je vécu ma journée du dimanche après la Messe : en mettant en pratique la Parole entendue ? En usant de la charité de Jésus reçue dans la communion pour aimer ma famille, mes amis ? En m’appliquant amoureusement à mon devoir d’état et à mon travail dans la semaine ?

C’est pourquoi saint Paul résumera la Loi en disant : « L’amour ne fait point de mal au prochain : l’amour est donc l’accomplissement de la Loi. »

« L’amour est donc l’accomplissement de la Loi »

Nous comprenons alors que si l’amour c’est la Loi, celle-ci ne peut être vécue parfaitement que si nous sommes impulsés par l’Amour vrai et infini, l’Amour de Dieu qui nous est donné par son Esprit.

Ce n’est pas pour rien que Paul nous rappelle : « L’Amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par l’Esprit qui nous a été donné. » C’est pourquoi l’on peut dire que l’Esprit est la Loi du chrétien !

L’Amour divin est un amour totalement oblatif, une tension bienveillante et bienfaisante vers et pour l’autre, un amour d’agapè, c’est-à-dire totalement gratuit et manifesté activement. C’est le même Amour avec lequel le Père aime le Fils et le Fils aime le Père : chacune de leur deux Personnes n’existent que pour l’autre !

Nous, nous existons bien sûr avant d’aimer, mais surtout nous aimons généralement pour nous, pour ce que cela nous apporte, et même nous rapporte ! Cet amour est possessif, captatif. C’est pour cela qu’on l’appelle eros (désir).

« Aimons-nous les uns les autres puisque l’amour est de Dieu. »

Le premier gros caillou de ma vie est donc de puiser à la source de l’Amour de Dieu, de m’ouvrir à cet Amour qui est en moi. Et c’est cela que signifie « aimer Dieu. » Car en m’ouvrant à Son Amour je ne fais rien d’autre que Le laisser m’aimer, m’habiter donc, et repartir en action de grâce spontanée vers Sa Source, le Père.

Le deuxième gros caillou de ma vie est de laisser cet Amour oblatif et complètement dépossédé de soi s’emparer de mon amour captatif, le laisser assumer et transfigurer l’eros qui est en moi par cet Agapè qui vient de Dieu, afin de pouvoir aimer mes frères -qui sont Ses enfants- du même Amour qu’ils sont aimés de leur Père céleste. Ainsi pourrai-je leur proposer de goûter à la Joie de l’Amour divin.

C’est ainsi que j’accomplirai les deux grands commandements qui me feront entrer dans le Royaume.

Mgr Jean-Marie Le Gall

Aumônier catholique

Hôpital d’Instruction des Armées de Percy, Clamart.

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